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[Animation] Récits d'Invention #9 : Vous êtes ahu(riz)...

Par Lilizefou#7020 - ABONNÉ - 07 Août 2020 - 15:25:45
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               Suite à tous ces récits, la foule commençait à se dissiper. C’est alors qu’une petite voix s’éleva. La foule autour d’elle s’écarta laissant place à une petite pandawa.

« Je vais vous conter l’histoire oubliée, qui me fut contée par ma mère, tenue de sa mère. Une histoire qui est née il y a plus d’une centaine d’années. L’histoire tourne autour d’une question, une question qui se pose à chaque génération et qui fait l’objet d’un grand débat. Apportée par un sage, de toutes les régions de Pandala elle fit le tour et plus d’un pandawa brisa sa choppe par désaccord. »

               Les visiteurs du musée attirés par la douce voix de la jeune aventurière s’étaient rapprochés, plus intrigués par la nature de cette question et ses conséquences que par leurs laits de bambou les attendant à la taverne. Après tout, une histoire supplémentaire leur permettra d’avoir davantage de connaissances sur l’histoire de ce grain historique. Il se dégageait une aura autour de la narratrice qui leur donnait envie de tout connaitre de cette énigme, le flot de ses paroles les emmenant dans cette époque lointaine à laquelle elle faisait référence. Après une courte pause visant à captiver son auditoire, la pandawa reprit.

« Quelle question est plus posée que celle de l’origine de chaque chose. Tous ici se sont déjà demandé d’où proviennent les mots que nous prononçons, le lait que nous buvons, l’air que nous respirons. Ce grain n’y fait pas exception. Plus que son origine, nombreux furent nos ancêtres qui se demandèrent où était la rizière qui résoudrait ce mystère. C’est alors qu’un vieux sage, du moins davantage que nous autres, arriva avec son énigme. En se penchant sur ce grain origine, il en était venu à supposer qu’il venait d’une rizière originelle, elle-même provenant, il en était certain, d’un autre grain de riz. Y aurait-il donc encore un grain de riz plus ancien que celui-ci ? Et sa rizière ? » 

              Aventuriers, simples visiteurs et riziculteurs aguerris tous se regardèrent abasourdis par ce que la jeune locutrice avançait. Leurs idées se bousculaient, ils ne savaient plus quoi penser. Ils se heurtaient au même problème que lorsqu’on leur demandait qui du tofu ou de son œuf était venu en premier. Jamais ils ne s’étaient inquiétés de l’origine de ce grain qu’ils savaient être le premier. La pandawa, continuait son récit sans prendre en compte la sensation de perturbation ambiante.

« La question se propagea rapidement dans les cinq régions de Pandala. Un riche propriétaire terrien voulu percer ce mystère et en échange d’un butin convia chacun à chercher la solution. Il n’en fallut pas plus, chacun se mis à réfléchir, cherchant une faille dans la logique pourtant implacable du sage. Les Dieux furent mentionnés pouvant expliquer son apparition miraculeuse. D’autres avancèrent l’hypothèse d’une plante s’étant transformée au fil des ans qui aurait produit ce grain unique avant de disparaitre après une tempête, laissant une trace unique que chacun peut contempler dans ce musée. L’enquête des habitants prit de telles ampleurs, que des disputes commencèrent à éclater entre les deux clans. Chacun opposant son idée à l’autre, un air de discorde se répandant à travers Pandala. Pour résoudre cette discorde, le riche propriétaire invita chacun à venir défendre son idée devant tous ainsi que devant un buffet. Comme tout bon pandawa, il prévu du lait de bambou pour qu’il en coule à flot. La foule arriva, quelques-uns, courageux, s’élancèrent sur le devant de la scène. Certains avancèrent des propos que chacun qualifia d’inepties, tandis que d’autres avaient des arguments qui ne pouvaient être réfutés. Mais peu à peu les esprits s’échauffèrent, il était si difficile de savoir qui du grain ou de la rizière venait en premier. Pour calmer ses invités, l’hôte remplit les choppes. Encore et encore… Tant est si bien que le lendemain, aucun ne se souvenait quelle était la question qu’ils cherchaient à résoudre. Et celle-ci se perdit dans le temps sans que jamais une solution ne lui soit apportée ».

               La jeune femme se tut, son récit achevé, et s’effaça dans la foule qui murmurait cherchant à résoudre le mystère du grain de riz.
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Tout Pandala était en effervescence ces derniers jours. Les aventuriers venaient des quatre coins du Monde des Douze jusqu'à l'île sacrée des pandawas, pour pouvoir admirer de leurs propres yeux l'objet de cette euphorie générale. Michel Biair'keuchpréfair, un jeune pandawa, lui, était tout aussi intrigué par cet immense rassemblement d'aventuriers que par l'objet de leur admiration lui-même, et se rendit donc ce matin-là à l'endroit où le rassemblement avait lieu. Il vit alors un bâtiment en bambou, devant lequel était agglutiné des centaines de personnes. Commençant à désespérer de pouvoir entrer dans le bâtiment, il s'apprêtait à faire demi-tour, lorsqu'une main se posa sur son épaule. Il leva les yeux, et vit une pandawa très âgée se tenir devant lui, un regard bienveillant posé sur lui.
« Aie patience, jeune homme ! dit la vieille pandawa. N'as-tu pas envie de voir ce qu'il y a à l'intérieur ?
- Bien sûr que si ! Répondit Michel. Mais à ce rythme là, nous n'y entrerons pas avant le crépuscule..
.- Et si je te disais que je savais ce qui se trouve à l'intérieur ?- Vraiment ? S'étonna Michel. Et qu'est-ce donc ?
- Il s'agit d'un grain de riz. Mais pas n'importe lequel ! Un grain de riz chargé d'une triste histoire.
- Vous connaissez son histoire ? »
Un sourire triste apparut sur le visage de la vieille pandawa, et son regard se perdit à l'horizon.
« C'était il y a très longtemps, dit-elle. A une époque si lointaine que peu de gens en ont gardé le souvenir. En ce temps, Pandala était aussi prospère que Bonta, et de magnifiques villes de bambou peuplaient notre terre. Il va sans dire que l'île était alors bien plus grande qu'elle ne l'est aujourd'hui, mais nous y reviendrons plus tard.
« Ainsi, l'île était prospère, riche et luxuriante. Mais malgré cela, ses habitants vivaient modestement, remerciant la déesse pour les bienfaits qu'elle leur procurait, et pour la quiétude de leur île. Dans un petit village côtier, Shin et Towa, un couple de pandawas qui s'aimaient éperdument, vivaient dans l'harmonie la plus totale. Tous deux étaient apprentis. Lui, chez le brasseur du coin, et elle, chez la meilleure tisserande de la région. Il ne leur restait plus que quelques mois d'apprentissage avant qu'ils ne puissent se mettre à leur compte, construire leur maison et fonder une famille. Et, pour marquer cette promesse qu'ils s'étaient faits l'un l'autre, ils gardaient chacun dans leur poche un grain de riz dans une petite bourse magique, qui préservait son contenu des ravages du temps. Ce grain de riz étaient spécial pour eux, puisqu'ils l'avaient ramassé le jour de leur rencontre.
« Ce jour-là, ils rentraient donc dans leur demeure respective après une journée de labeur, et se rejoignirent sur la colline qui dominait leur village pour leur rendez-vous quotidien. Ils se mirent à rêvasser, à s'imaginer leur vie future, et ils se mirent à rêver du paradis que cela serait. Lorsque, soudain, l'horizon au-dessus de la mer se teinta d'un rouge ardent, et de sombre nuage noir se formèrent au-dessus des flots. Shin et Towa se relevèrent immédiatement, tandis qu'une sombre cacophonie se mit à résonner dans les airs. Le vent se figea soudain, les animaux se turent, et tout se figea. Tout, à l'exception de ces étranges nuages noirs qui s'approchaient du village à une vitesse vertigineuse. Les deux amants ne demandèrent pas leur reste, et coururent jusqu'au village pour avertir les autorités. Mais lorsqu'ils arrivèrent, la panique avaient déjà gagné les habitants : les hommes, les femmes, les enfants, les jeunes, les vieillards, les tofus... Tous couraient en tous sens en hurlant à la fin du monde. Au milieu de ce chaos une dizaine de soldats aiguisaient la lame de leur katana et l'enduisaient d'une étrange substance verdâtre. Shin s'approcha d'eux et demanda quelle était la situation, désireux de se rendre utile. Le soldat lui répondit que l'on en avait aucune idée, mais qu'il valait mieux déguerpir, dans le doute. Shin s'apprêtait à protester, mais il vit le visage effrayé de Towa et, mettant son honneur de côté, prit la fuite avec sa bien aimée. Ils se rendirent à la ville la plus proche, accompagnés par de nombreux villageois. Toutefois, en arrivant sur place, ils constatèrent avec stupeur que tous n'étaient pas là. Peu de temps après, un des soldats du village survint, grièvement blessé, le regard hagard et empli de terreur, comme s'il avait vu la Faucheuse elle-même. Il rendit l'âme aux portes de la ville mais, avant de rendre son dernier souffle, il parvint à murmurer un mot, un seul : « Shushu. »
« Les Shuhus, emplis de jalousie et de convoitise face à la paix et la quiétude qui régnaient en Pandala, avaient décidé de semer le chaos sur l'île. Ils détruisirent une très grande partie de l'île, allant même jusqu'à en submerger la plus grande partie, ne nous laissant qu'un bout de terre à peine plus grand qu'Amakna pour nous y réfugier. Un front de rébellion se mit alors une place, et immédiatement, Shin voulut en faire partie, malgré les protestations de Towa. Toutefois, le jeune pandawa ne voulait rien entendre. De ce fait, avant chacune des offensives menée contre les démons, Towa rappelait à Shin leur promesse, et l'homme lui assurait que son grain de riz restait toujours près de son cœur. Toutefois, l'inévitable se produisit. Un jour, tandis que les combattants rebelles revenaient d'un raid, Towa ne trouva pas Shin parmi les survivants. Elle s'approcha des guerriers, sans un mot, le yeux brillants de larmes et le visage implorant. Pour toute réponse, elle eut un visage désolé, et une main sur l'épaule. Durant les jours qui suivirent, Towa s'isola dans sa cabane, refusant de manger, de boire et de dormir. Elle se contentait de rester allongée, recroquevillée sur elle-même, tenant la bourse qui contenait le grain de riz contre son cœur. Décidée à se laisser dépérir pour rejoindre Shin le plus tôt possible, le sort des rebelles lui importait désormais peu. Même lorsque des lueurs ardentes envahirent un jour le ciel, que les cris caractéristiques des Shushus emplirent la jeune nuit, et que les cris déchirants des pandawas retentissaient, expression d'une terreur et d'une douleur innommables, elle restait recroquevillée sur elle-même, priant pour que sa mort soit rapide.
"Mais elle eut soudain une vision. Était-ce la déshydratation ou la fumée qui lui jouait des tours, ou était-ce une intervention divine ? Elle ne le sut jamais. Toujours est-il que Shin apparut devant elle, portant une simple tunique de fermier, mais il ne portait plus la bourse qui contenait le grain de riz.
« Ne te laisse pas mourir, Towa. Je t'en prie, par amour pour moi, ne meurs pas.
 - C'est trop dur, sanglota-t-elle. Je ne peux vivre sans toi.
- Tu n'auras pas à le faire éternellement. Là où je suis, je possède une ferme, des rizières, et une magnifique maison où nous pourrons vivre heureux ensemble, jusqu'à la fin des temps, mais auparavant, tu dois accomplir ton destin.
- Mon... Mon destin ?
- Tu es la fille de la Déesse, Towa. Tu possèdes d'immenses pouvoir dont tu n'as même pas conscience, et c'est à toi de vaincre les Shushus et de libérer Pandala.
- A moi ? Mais... Je ne suis qu'une simple tisserande au cœur brisé. »
Shin sourit alors avec bienveillance.
« Pour moi, dit-il, tu es bien plus que cela. »
"Et, à l'instant où il dit ces paroles, il s'évanouit comme de la brume évaporée par un courant d'air. Mais Towa n'eut pas le temps de se remettre de ses émotions car, au même instant, un Shushu se jetait sur elle. Il était horrible, avec son immense corps humanoïde couvert d'écailles sombres, ses longues griffes acérées sanguinolentes, ses six yeux dont deux se trouvaient sur sa poitrine, et sa mâchoire ridiculement et démesurément grande, couverte du sang de ses pairs. Sans réfléchir, Towa ferma les yeux et tendit les bras devant elle en guise de geste de protection et il y alors un bruit d'explosion. Elle s'attendait à tout instant à être frappée par l'immonde créature, mais le coup de vint pas et, au bout d'un moment, elle osa ouvrir un œil, et ce qu'elle vit la stupéfia au plus haut point. Devant elle, s'était formé un cratère en éventail d'une bonne centaine de mètres, lequel semblait avoir pour origine... Nulle autre qu'elle même. La vallée, les habitations, les murailles, mais aussi les Shushus : tout avait été pulvérisé. La jeune pandawa sentit alors un pouvoir nouveau parcourir ses veines, et elle examina ses mains avec curiosité, se demandant comment elle avait pu posséder un tel pouvoir tout ce temps sans même le savoir.
"Soudain, les démons restants, remis du choc que la déflagration d'énergie avait provoqué, se jetèrent sur Towa. Cette dernière se souvint alors du sourire de Shin quelques instants plus tôt, et de ses paroles. « Je te rejoindrai, songea-t-elle, et nous aurons notre éternité de bonheur. Mais pas maintenant, pas encore. » Puis, elle leva les bras devant elle, en direction des Shushus, et ils furent pulvérisés en un éclair. Tout n'était pas perdu.
"Durant les années qui suivirent, Towa s'attela à éradiquer tous les démons qui croisaient son chemin, et à libérer les différentes villes de Pandala. Et, lorsqu'elles avaient été toutes libérées, elle se retrouva face au général qui dirigeait l'invasion de l'île natale de la jeune femme. Le combat entre la pandawa et le Shushu fut digne des plus grandes sagas, et l'on dit que si on tend l'oreille dans les forêt de Pandala, on peut encore entendre les échos de leur combat. La bataille fut de longue haleine et ardue, mais Towa finit par l'emporter, éliminant une fois pour toute la menace des démons de Pandala. La paix pouvait de nouveau régner à Panda, et la reconstruction de l'île commença. Au fil des années, Towa remarqua que le temps n'avait pas la même emprise sur elle que sur les autres pandawa : elle vieillissait beaucoup plus lentement que les autres. De ce fait, elle aida à la reconstruction de l'île, mais devint également la gardienne de Pandala, et des siècles durant, elle y maintint la paix. Toutefois, durant tout ce temps, elle chercha la bourse de Shin. Elle se rendit sur les différents champs de bataille, et parcourut le monde dans l'espoir de la retrouver, en vain. Jusqu'à récemment, lorsque des rumeurs au sujet d'un grain de riz daté de plusieurs siècles aurait été retrouvé dans une bourse magique, et exposé au nouveau musée à Pandala. Dès lors, Towa sut qu'elle devait s'y rendre, et que cela serait son dernier voyage. »
Lorsqu'elle termina son récit, une larme roula sur la joue de la vieille pandawa et alla se perdre dans sa fourrure. Michel la regardait avec un mélange de surprise, d'euphorie, de compassion, et de tristesse.
« - Towa, dit-il. Je... Je suis désolé. »
La vieille pandawa ne répondit pas. A cet instant, ils furent tous deux permis d'entrer dans le musée, la foule ayant diminué pendant que l'aînée racontait l'histoire du grain de riz. Michel et la vieille pandawa entrèrent donc dans le bâtiment, et virent, au milieu d'une gigantesque pièce, une vitrine d'un mètre de hauteur dans laquelle était exposé un unique grain de riz, immaculé, beau et pur. La vieille femme s'approcha de la vitrine, sortit d'une de ses poches une vieille bourse en cuir, et la posa sur la vitrine. Puis, elle alla s'asseoir sur un banc non, loin, bientôt imité par Michel. Ils restèrent tous deux ainsi assis, silencieux, contemplant les deux grains de riz enfin à nouveau réunis. Michel se tourna alors vers la vieille femme, et il vit qu'elle avait désormais les yeux fermés, une ultime larme figée dans ses poils noirs et blancs, et un sourire de quiétude sur son visage ridé.

Il sut alors qu'elle avait rejoint Shin.


 
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Score : 30
            A la suite de ce nouveau récit, la foule entière bavassait, chacun se demandant quelles aventures rocambolesques allaient encore leur être contées. Brisant le bourdonnement ambiant, une Pandawa leva fièrement une bouteille de Shaké et lança :

- Attendez, vous avez pas encore entendu la meilleure ! Ou bien la pire ? Je sais pas trop faut avouer …

             En titubant, elle traversa la foule qui chuchotait sur son passage, et finit par atteindre le piédestal sur lequel se tenait le sujet de tous les récits du jour. Arrivée face au grain de riz, elle finit sa bouteille et la jeta par terre dans un grand éclat de verre qui fit définitivement taire tous les murmures. Les mains sur les hanches, elle faisait face à la relique comme s’il s’était agi de son pire ennemi. Sur le qui-vive, les gérants du musée s’inquiétaient que la Pandawa ivre attaque et fasse des dégâts. Lorsque celle-ci bougea et commença à dégainer quelque chose d’une de ses poches, ils se précipitèrent tous vers elle pour l’arrêter avant qu’il ne soit trop tard. Ce fut le bruit d’un bouchon qui saute qui les stoppa tous net, réalisant alors qu’elle avait juste entamé une nouvelle bouteille pour continuer à boire.

- Alors, par où commencer ? Par le début évidemment ! Cette histoire débute il y a 15 ans, quand je n’étais encore qu’une enfant. Mon père, Kasper Gilus, faisait depuis peu du Shaké, et il se vantait à qui voulait l’entendre qu’il serait bientôt le meilleur brasseur. Pour y parvenir, il utilisait l’eau la plus pure d’Akwadala et achetait le riz de la meilleure qualité qui existe. Croyez-moi, son Shaké en valait la coupe ! Son meilleur ami, et par extension mon parrain, nous rendait régulièrement visite afin de voir l’avancée des différents brassins. A cette époque, Jeannot Vel, car c’était son nom, était presque l’associé de mon père.
Lors d’une de ces visites, Jeannot était arrivé tout sautillant, exalté par l’annonce récente qu’avait faite Pandala : un pont serait construit pour relier Pandala au reste du monde des Douze. Tous les architectes de l’île pouvaient aller proposer leur idée et la meilleure serait retenue.
Naturellement, Jeannot Vel comptait participer, et même s’il venait tout juste de se lancer dans l’architecture, il était persuadé qu’il pouvait gagner. Quand il l’annonça à Kasper Gilus, sûr d’obtenir son soutien, mon père se mit à rire aux éclats.

« Un jeunot comme toi ? Impossible que tu y arrives, tu sais très bien que tu n’as pas encore assez d’expérience ! Viens plutôt voir mon dernier brassin, il est en pleine sédimentation. Bientôt, j’aurais assez de Shaké pour ouvrir ma taverne. »

Complètement refroidi, Jeannot avait suivi son meilleur ami, accordant moins d’intérêt que d’habitude aux différents brassins. Mais en regardant dans la dernière cuve, il vit un grain de riz inaltéré flottant à la surface. Amer de sa précédente discussion, il attrapa le grain et se moqua.

« Je suis peut-être trop jeune pour gagner ce concours, mais toi tu es trop nul pour devenir le meilleur brasseur. Regarde ça, un grain de riz intact dans un brassin qui est censé contenir un Shaké quasiment terminé. Je préférerais encore boire de l’eau que de goûter à ton Shaké ! Et je vais garder ce grain comme symbole de ton échec. »

Là-dessus, Jeannot avait soulevé son solomonk pour cacher le grain dans sa tignasse.

             La Pandawa s’arrêta dans son récit pour finir son Shaké, et sortir de sa sacoche un petit tonnelet de Pandapiels. Son auditoire espérait qu’elle finisse son histoire avant de tomber ivre morte. Quant aux agents de sécurité du musée, ils hésitaient de plus en plus à intervenir. Un énorme rot retentit, à en faire trembler les vitres.

- Il fallait qu’il sorte celui-là ! Où j’en étais déjà ? Ah oui ! Il fallait que Jeannot sorte, et ce, avant que Kasper et lui en viennent aux mains. J’avais pris mon parrain par la main et l’avait tiré jusqu’à la sortie. Puis, j’étais retournée près de mon père blessé et en colère. Dans les jours qui suivirent, Jeannot ne revint pas et mon père mit les 1 500 litres de Shaké raté dans six tonneaux. Il les marqua d’une croix rouge et les isola dans un coin de la cave. Il ne savait pas encore ce qu’il en ferait, mais il ne pouvait se résoudre à le jeter. On ne gaspille pas de l’alcool !
Quelques temps plus tard, Jeannot vint frapper à notre porte, une bouteille de Pandarium Tremens grand cru dans les bras. Kasper le fit entrer sans un mot et ils s’installèrent autour de notre vieille table en bois. Un peu embarrassé, Jeannot posa la bouteille sur la table en s’excusant pour ce qu’il avait dit la dernière fois. Mon père s’est alors levé, a contourné la table et a pris Jeannot dans ses bras.

« Il y a pas de pépins, j’ai pas été tendre non plus avec toi concernant ce concours ! »

« Justement, à ce sujet … mon projet a été sélectionné. J’ai gagné. »

Mon père a failli en tomber à la renverse, tellement il était surpris.

« Mais … Comment est-ce possible ? »

« Je ne sais pas trop, moi-même je n’arrive pas à y croire. J’étais assis, entouré de dizaines d’architectes, leurs projets semblaient tous plus géniaux les uns que les autres. J’ai eu le malheur d’éternuer, ce qui a attiré les regards de toute l’assemblée. Pire que tout, ton grain de riz que j’avais gardé sur la tête est tombé au même moment. Je pensais qu’ils allaient tous me prendre pour un pouilleux et que les cawottes étaient cuites. Et là, le Pandarin Sudopong s’est levé et a dit « c’est lui qu’il nous faut ! » Incroyable n’est-ce pas Kasper ? »

            La Pandawa fit une nouvelle pause. Sans compter tout ce que les gens ne l’avaient pas vu ingurgité, elle venait de vider son tonnelet et était dans un état d’ébriété assez important, même pour un Pandawa. Elle racontait en prenant des voix différentes et en mimant à grands renforts de gestes. De crainte de se prendre un coup, la foule s’était écartée d’elle, lui laissant tout l’espace nécessaire à ses gesticulations. Sortant une flasque de sa cape, elle reprit.

- Bref, vraiment incroyable. Et pourtant, Jeannot Vel s’est retrouvé à la tête du chantier du pont. C’était un joyeux bazar si vous voulez mon avis ! Avec mon père, nous étions allés le voir un jour. Comme tout architecte qui se respecte, il essayait de motiver ses ouvriers à l’aide de son Cor. Et même s’il possédait un Cor Busier, l’un des plus rares et puissants, ses ouvriers pandaliens n’avaient pas le cœur à la tâche, mais avaient fort à cœur de vider des tonneaux entiers de Pandapiels.
Un peu rancunier, et se souvenant encore de la pique de Jeannot, Kasper Gilus ne put se retenir ce jour-là de se moquer ouvertement.

« Mon ami, si mon échec en tant que brasseur avait la taille d’un grain de riz, le tien aura la taille de ce pont ! »

D’abord vexé, mon parrain sembla soudain s’illuminer comme s’il venait d’avoir l’idée du siècle.

« Par la Sainte Bibine, Kasper tu es un génie ! Qu’as-tu fait de ce Shaké ? Celui que j’ai honteusement critiqué, que la Reine des Chopes m’en pardonne d’ailleurs … »

Jeannot a ensuite expliqué à mon père qu’il pensait que le grain de riz était celui de la Légende, celui que l’on nommait l’Unique, le Grain d’Or ou le Grain de Fortune selon les récits. Après tout, c’était forcément grâce à celui-ci qu’il avait remporté le concours du pont, et en suivant cette logique, le Shaké dans lequel il s’était retrouvé plongé devait donc être spécial. Kasper approuvait l’idée sans comprendre où Jeannot voulait en venir.

« Kasper, imagine un instant que mes ouvriers boivent ton Shaké plutôt que cette Pandapiels. Peut-être qu’ils deviendront extrêmement forts ? Ou alors, ils seront à l’écoute de mes ordres ? Je n’ai aucune idée des effets qu’auront ce Shaké, mais mon instinct me dit qu’il faut essayer ! »

Totalement convaincu, mon père revint chez nous, charga les six tonneaux sur son chariot et retourna le lendemain sur le chantier. Deux chopes de Shaké furent données à chacun des ouvriers, ce qui mit à sec le premier fût. Quant aux Padawas, ils mirent à danser, tout en fredonnant :
« Pandawas de la Chope Ronde, goûtons voir si l’Shaké est bon !
Goûtons voir ! Oui, oui, oui ! Goûtons voir ! Non, non, non ! »

Et comme s’ils suivaient une chorégraphie bien rodée, ils se mirent à construire le pont, rondin par rondin, en continuant de chanter. Je me souviens encore de mon émerveillement en les voyant tous agir ainsi. Aucun d’eux ne titubait, ni ne faisait de faux pas. Ils étaient tous motivés sans même avoir entendu le son du Cor Busier de Jeannot Vel. C’était incroyable, c’était le pouvoir du Grain de Riz.Les ouvriers travaillaient avec tant d’ardeur, qu’au rythme d’un tonneau de Shaké par jour, le pont reliant Pandala à l’Est d’Astrub fut terminé en 6 jours. A la suite de cet événement, les rumeurs couraient sur l’établissement de mon père et le « Shaké Kasper enchanteur ».

             Remarquant alors que sa flasque semblait vide, la Pandawa s’arrêta pour la retourner complètement, dans l’espoir de récupérer une ultime goutte d’alcool. Mais rien. Nada. Fort étonnée, elle regarda dans un coin de l’immense salle du musée, tout en se demandant si les murs ondulaient autant tout à l’heure. Une Roublarde fendit alors la foule, une chope de Panduvel dans une main, subtilisant discrètement quelques objets coûteux avec l’autre. Sans peur, elle se planta devant la Pandawa.

- 200 kamas et tu récupères ta chope.
- Maudite Roublarde ! Tiens, voilà tes kamas !

             La Roublarde retourna d’où elle venait pendant que la Pandawa se réhydratait avec délice. Elle put alors reprendre le cours de son récit en se plaignant.

- Comme vous pouvez le voir, tout a un prix. Et parfois, croyez-moi, celui-ci est trop élevé à payer. Vous l’avez entendu auparavant, ce que le Grain de Riz donne, il le reprend, même si c’est sous diverses formes. La Iopette a eu la vie sauve contre une affreuse balafre à l’abdomen, l’assassin Cleed le Lenald s’est fait assassiné par sa propre arme, et la vieille pandalienne dont la famille s’est retrouvée exilée, après avoir prospéré dans la riziculture pendant une génération.
Par conséquent, vous vous en doutez, mon histoire n’est pas terminée. Jeannot Vel avait réalisé à quel point le pouvoir du Grain de Riz était grand, et il s’imaginait déjà devenir le plus grand architecte du Monde des Douze grâce à celui-ci. Alors quand il vint pour s’en vanter à mon père, ce dernier s’est énervé en lui disant qu’à l’origine, le Grain de Riz était à lui puisqu’il était dans l’une de ses cuves de Shaké. Kasper aussi espérait utiliser le Grain de Riz pour brasser encore de ce « Shaké Kasper enchanteur » !
Après une bagarre pandalienne en bonne et due forme, mon père et Jeannot ont fini par décider de jouer le Grain au bras de fer. Chacun d’un côté de notre grosse table de bois, l’enjeu de ce face-à-face posé entre eux, ils se mirent en position et entamèrent le combat quand j’eus donné le top départ.
J’eu l’impression que cela durait depuis des heures, aucun des deux ne voulant perdre face à l’autre, l’enjeu était trop gros. Cependant, je vis dans les yeux de mon père l’instant où il se relâcha légèrement, et mon parrain le vit aussi car il en profita pour abattre le bras de Kasper de toute sa force. Celle-ci fut telle que notre table en trembla. Mon père soupira, sachant accepter sa défaite qui lui semblait légitime.

« J’ai gagné ! Le Grain de Fortune est à moi ! »

Malheureusement, quand il voulut récupérer son butin sur la table, celui-ci n’y était plus.

« Tu l’as subtilisé ! C’est pour ça que tu m’as laissé gagner ! »

Mon père eut beau lui jurer sur la Soif Eternelle que ce n’était pas le cas, et que lui non plus n’avait aucune idée d’où il avait pu disparaître, il était trop tard. Les grains de la discorde étaient semés.
Mon parrain ne ressemblait plus à l’homme bienveillant et drôle que j’avais toujours connu.

« Kasper, tu n’es qu’un voleur, doublé d’un traître ! »

Et c’est sur ces mots qu’il est sorti de chez nous, claquant la porte derrière lui. Ce soir froid de Flovor fut le dernier jour où je vis mon parrain Jeannot Vel. Quant à mon père, il fouilla toute la maison dans l’espoir de retrouver ce maudit Grain. Pris de frénésie, il utilisa tous les sacs de riz qu’il avait, pensant que le Grain réapparaitrait à la surface de l’une de ses cuves. Mais plus jamais Kasper Gilus ne refit de « Shaké Kasper enchanteur ».
Aujourd’hui, mon père est à moitié fou, cherchant désespérément à remettre la main sur ce maudit Grain de Riz. Mon parrain semble avoir disparu du Monde des Douze, et plus personne ne se souvient qu’il est celui qui a construit le Pont de Pandala. Comme s’il n’avait jamais existé !

             Aux bords des larmes, la Pandawa finit sa chope cul-sec, et la laissa tomber au sol. Elle se redressa alors de toute sa hauteur pour toiser la foule.

- Alors rappelez-vous en regardant ce grain de riz que tout a un prix, car l’équilibre des choses est primordial.

             Elle s’effondra finalement au sol, toujours consciente mais incapable de tenir debout. La même Roublarde que précédemment vint la récupérer, la traînant à travers toute la salle jusqu’à atteindre son coin un peu à l’écart de la foule. Comme cette dernière semblait ne pas pouvoir détacher ses yeux de cet étrange duo, la Roublarde se vit obligée de prendre la parole pour retrouver sa tranquillité.

- Ne faites plus attention à elle, vous n’avez qu’à continuer de raconter vos multiples récits sur ce grain de riz.

             Les gens recentrèrent alors leur attention sur le piédestal, dans l’attente de la prochaine aventure qui leur serait contée.
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Score : -93
Certains voient dans la banalité la simple banalité, d'autres trouveront dans la banalité l'occasion d'un récit extraordinaire. Un grain de riz, que peut bien faire un grain de riz dans un musée de l'île de Pandala ? C'est une longue histoire, que je vais vous conter. Il y a de cela très longtemps un vaillant Pandawa du nom d'Elkenor était reconnu comme le meilleur brasseur de Pandabsynthe de l'Île mystérieuse du monde des Douze. Tout le monde voulait savoir d'où lui venait cette faculté rare et précieuse de transformer un simple grain de riz en une liqueur si formidablement bonne. Surtout, d'où venait ce goût exquis, reconnaissable entre mille. Il coulait des jours paisibles, il vivait dans une petite maison au cœur des champs de riz d'Akwadala.

Mais un jour, le destin vint le mettre à l'épreuve. En se réveillant pour s'occuper de la fabrication de ses liqueurs, il tomba sur un mystérieux petit grain de riz qui gisait sur le sol. Il le rangea avec les autres grains de riz destinés à produire le précieux liquide. Il fermentait donc tout son riz pour en retirer le produit fini, mais un problème demeurait... En effet, il restait un grain de riz à la fin du processus, c'était le grain de riz qu'il venait de trouver sur le sol de sa distillerie. Surpris, il contempla le simple objet à la lueur du soleil. Il était parfaitement intact, rien ne semblait s'être passé sur lui, aucune altération, d'aucune sorte.

Surpris, Elkenor se vexa fortement, jamais aucun grain de riz avait résisté au processus de fabrication de la Pandabsynthe. Alors, vous vous doutez bien, il continua encore et encore à produire sa liqueur, chaque fois en ajoutant le fameux grain de riz dans la composition, il finissait toujours en flottant sur le liquide précieux sans avoir subi aucune altération. Alors, il décida d'aller poser la question à une magicienne qui vivait dans la forêt de Plantala. Celle-ci lui dit alors qu'il s'agissait d'un grain de riz enchanté par la déesse qui l'avait offert au précédent propriétaire de la distillerie, car elle en était tombée amoureuse. Ce grain de riz possédait le pouvoir de donner une saveur exceptionnelle aux liqueurs, mais était parfaitement indestructible, car la déesse n'accepterait pas que l'on touche à ce simple grain de riz. Le feu du dragon même ne pourrait pas détruire cet objet, aucune arme d'aucune sorte ne pouvait en venir à bout. Bien des aventuriers vinrent essayer de le détruire, mais en vain. Jamais personne n'avait réussi à altérer la régularité parfaite de l'ovale lisse et blanc de ce petit objet curieux.

Quelle chance ! Elkenor avait entre ses mains un bien aussi précieux. Toute sa vie durant, il profita de ce cadeau. Le grain de riz avait traversé le temps et subit de nombreuses distillations sans jamais être détruit. Nul ne sait, aujourd'hui, qui fut le premier possesseur de ce grain de riz, mais tout porte à croire qu'il a appartenu à un mortel duquel la déesse était tombée amoureuse. Un jour, la mort drapée de son long manteau noir s'empara de la vie d'Elkonor, il offrit ce grain de riz au musée de Pandala, en narrant cette formidable trouvaille. 

Réfléchissez bien maintenant, avant de manger votre riz, il pourrait s'agir d'un fabuleux trésor.

FIN
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Score : 660
Pour son neuvième anniversaire, j’ai emmené mon fils au musée. Il est toujours à lire toutes sortes de livres de l'encyclopédie aux mangas en passant par les romans alors je savais que cette sortie, où la culture était au centre des attentions, lui ferait plaisir. Il remuait la queue alors que nous n’avions pas encore passé le zaap pour Pandala.

Lors de la visite, nous n’allions pas au même rythme; je suppose que nous n’étions pas intéressés par les mêmes choses. Je dois, toutefois, préciser qu’il lit déjà bien plus vite que moi. Je n’ai jamais vraiment porté un intérêt pour la lecture, ce qui est tout le contraire de mon fils. Les voisins disent que c’est une conséquence de son mutisme, mais l’origine de ce don n’est guère importante pour moi. Je l’ai donc laissé se promener seul dans le musée et nous nous sommes donné rendez-vous à l’entrée une heure plus tard avant de retourner à la maison. Sur la route, il m'enlaça pour me remercier, ce qui ne manqua pas de faire sourire. La surprise avait atteint son but !

Dans la soirée, alors que nous mangions notre dessert dans le salon familial, nous avons partagé nos expériences avec ma femme, coincée au travail. Je lui ai parlé de l’étrange présence d’un grain de riz à l’exposition, puis elle demanda à notre fils des détails sur sa journée. À en croire ses petites oreilles poilues, il n’attendait que ça. Il se leva, courut et revint de sa chambre en trombe, son journal à la main. Mon fils avait l’habitude d’écrire ce qui lui passait par la tête à l’intérieur. Vous pourriez retracer d'innombrables récits réels ou imaginaires en feuilletant ces pages. C’était sa manière préférée pour communiquer. Je m’assis donc aux côtés de ma douce sur le divan alors qu’il me tendait le petit carnet à la bonne page pour que je puisse le lire à voix haute. C’était notre tradition quotidienne.

“D’après ce que j’ai compris, le musée battait son plein depuis plusieurs jours en raison d’un grain de riz. Les visiteurs défilaient pour poser leurs yeux sur la fameuse céréale dont tout le monde parlait. Quelle histoire ! L’histoire, justement. Quelle est son histoire ? Personne ne semble se mettre d’accord sur son origine ou son passé, mais je suppose que le mystère cultive la curiosité et l’imagination. J’ai entendu de nombreuses affirmations et hypothèses comme quoi il serait l’origine des plus grandes catastrophes agroalimentaires, inondations et courses-poursuites en raison de ses prétendus grands pouvoirs magiques !

Toutefois, notre petit conte du jour ne traitera pas de ce grain de riz, mais d’un autre protagoniste tout aussi riche en amidon. Dans une autre salle assez proche se trouve un autre présentoir, beaucoup moins protégé avec un petit coussin. Le héros de notre histoire a été délicatement posé par-dessus : un spaghetti.

Alors que la pièce éclairée du héros blanc continue de se remplir de visiteurs plus ou moins affamés, ce pauvre spaghetti se voit forcé à faire face à la solitude. Il attend, là, que son exposition se termine. Tout comme le grain de riz, personne ne sait ce qu’il fait ici. Je me pose la même question en ce qui concerne le conservateur du musée, pour être honnête. Ce sont des choix étranges, non ? On finira par faire un chili con carne ou des pâtes carbonara d’ici la fin de la semaine. Mais revenons à notre aliment.

Ce spaghetti attend seul dans l’obscurité. Cela me fait penser à certains de mes mangas où un gentil garçon vit dans l’ombre d’un autre et cumule une certaine frustration qui donne naissance à la haine. Ce spaghetti deviendra peut-être la Némésis de ce grain de riz, qui sait ? Une aventure épique attend ces féculents ! Il deviendra le roi des pirates des fruits de mer ! Ou alors, il devra chercher les sept boules de bolognaise pour devenir un Super-Savoureux ! L’autre deviendra peut-être un Riz Ninsoja !

Dans tous les cas, je soutiens aussi le spaghetti ! Il faut penser au futur en donnant les mêmes chances à tous ! J’ai fini ma visite en avance, et pourtant, me voilà assis sur l’un des bancs du musée pour y rédiger ces premières impressions. En regardant ce spaghetti, seul dans cette pièce, je me dis qu’il faut cesser de se tourner vers le passé, mais plutôt nous préparer pour le futur. Un grand avenir l’attend peut-être, tout comme le grain de riz. Les musées devraient nous faire réfléchir sur notre futur, plutôt que sur nos origines. Merci, Papa !”

La lecture terminée, je refermai le petit journal et regardai mon fils qui nous montrait ses belles canines pointues. Ce sourire est le signe qui me rappelle à quel point mon fils devient, petit à petit, quelqu’un d’exceptionnel. Ma femme et moi lui souhaitâmes, une nouvelle fois, un joyeux anniversaire, puis je passai ma main dans sa crinière. La fierté m’envahit. À sa naissance, lorsque nous nous sommes rendu compte qu’il ne pourrait jamais communiquer comme les autres enfants, cela me faisait très peur, mais je réalise maintenant que cela ne l’empêchera pas de tracer sa propre voie.
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Score : 178
    Jin était un jeune Kozaru de dix-huit ans turbulent et qui n’en faisait qu’à sa tête, s’étant persuadé que le monde ne lui avait offert aucun cadeau et donc, qu’il n’avait aucune raison d’être aimable en retour. Jin a cassé ceci, Jin a fait cela… Bien que les commentaires de ses jeunes camarades de classe incessants témoignaient de la solitude de Jin et du rôle de bouc émissaire qu’on lui avait accordé, le Kozaru n’en avait que faire. Orphelin depuis son jeune âge et vivant avec son grand père rendu fou par l’âge, Jin se contentait d’accomplir les tâches du quotidien – d’un ennui monumental – et de rentrer écouter les histoires de son grand-père, qui habitait tout en haut de la montagne.

«  Suzaku était le plus grand guerrier que Pandala ait jamais connu », démarrait-il toujours.
Le vieillard racontait la même histoire tous les soirs dès qu’il entendait Jin rentrer, abattu par sa journée. Ses yeux s’illuminaient dès qu’il prononçait le nom du légendaire guerrier.

« Il maîtrisait tous les arts-martiaux et combattait le sourire aux lèvres, venant à bout de n’importe quel ennemi en seulement quelques secondes de combat. Les vaincus disaient toujours ne se souvenir de rien, à part d’un voile rouge leur passant devant les yeux. Ainsi le surnommèrent-ils le Guerrier Rouge. Suzaku venait toujours en aide au plus faible, au plus miséreux. C’était un homme bon, et un guerrier redoutable. Lors de la guerre précédant l’unification d’Aerdala, opposant les clans de Hanshi et Shihan, le Guerrier Rouge avait disparu. »  

Jin pencha la tête. Combien de fois avait-il entendu cette histoire ? Pourtant, il semblait cette fois-ci que son grand père racontait quelque chose d’inédit. Sénile, mais toujours le meilleur conteur d’histoires qu’il ait connu. Il sourit, finit sa portion de riz puis partit se coucher dehors, sur un rocher qu’il affectionnait particulièrement. Lui et son grand père ne possédaient rien à part ce vieux dojo, et vivaient au dépends des maîtres du dojo d’Aerdala, qui leur envoyaient tous les jours de quoi subsister. Il leva les yeux au ciel pour admirer les étoiles et se demanda pour l’énième fois où étaient ses parents. Il s’imaginait un scénario dans lequel ils n’étaient que retenus quelque part, et qu’ils viendraient le chercher pour le délivrer de cet ennui. Jin s’endormit, le cœur lourd.Le lendemain matin, une foule était entassée devant le musée du village. En se faufilant au milieu de la foule, Jin aperçut l’objet qui provoquait l’attroupement. Sur un mur au fond de la pièce était accroché un cadre en or, bien qu’il n’y avait qu’une tache blanche au centre de celui-ci . Il réussit à se rapprocher pour lire la plaque sous le cadre sur laquelle était inscrite « Grain de Riz du Guerrier Rouge ». Suzaku ? Les gens autour de lui semblaient être attirés seulement par la nouveauté de la chose, Jin n’entendait personne parler du Guerrier Rouge. Après s’être fait une raison -et bousculé maintes et maintes fois – Jin décida d’aller en parler à son grand père. Sécher un jour d’école lui importait peu, et il brulait de savoir si son grand-père pouvait lui raconter quelque chose au sujet du grain de riz.

« Le grain de riz, Jin ? Tu dis vrai ? » Son grand-père avait les larmes aux yeux et pour un moment, semblait avoir recouvré la raison.

« Approche, je vais te conter une dernière histoire. Bien que Suzaku soit un guerrier légendaire, il n’en était pas moins un Kozaru. Un jour, alors qu’il parcourait les montagnes en cherchant un adversaire pour s’améliorer, il tomba nez à nez avec une femme au bord d’une cascade. Hana. Le grand guerrier n’avait jamais perdu de combat, encore moins été blessé, mais lorsque que Hana posa son regard sur lui, son regard transperça son cœur. Tout l’or du monde, toutes les victoires et toutes les beautés de ce monde n’avaient plus de valeur. Le Guerrier Rouge était tombé amoureux d’un simple regard, et il se jura que rien au monde ne l’empêcherait de séduire cette femme, et lui promis qu’il vaincrait les plus grands guerriers du pays si elle acceptait de l’épouser.Alors il redoubla d’efforts, terrassa les plus grands guerriers de Feudala en esquivant leurs tirs, esquiva les explosions des gardiens de la Dame des eaux, vaincut les féroces bêtes de Terrdala et ne fit plus qu’un avec les esprits de Plantala. Lorsqu’il revint plus fort que jamais dans son pays natal, Hana prit son visages dans ses mains, lui sourit et lui dit :  «  Vous voilà le guerrier le plus fort de Pandala, mais que ferais-je d’un mari qui ne sait même pas me nourrir ? »Suzaku repartit alors à Akwadala avec en tête d’apprendre comment cultiver le Riz, et jura à Hana qu’une fois revenu, elle n’aurait plus à se plaindre de la faim. Pendant des mois, ses plants se noyèrent ou s’asséchèrent, sa patience mise à rude épreuve. Il s’accrochait à ce qui lui était de plus cher : le sourire de sa bien-aimée. Il apprit peu à peu le savoir des Kwapa et son premier plant lui donna un seul et unique grain de riz. Explosant de joie, il prit ses affaires et son grain de riz et partit immédiatement rejoindre Hana pour lui montrer son exploit.L’Aerdala qu’il avait quitté n’était que l’ombre de ce qu’elle était. Rongée par une guerre interne entre les clans Hanshi et Shihan, tous les habitants avaient été entrainés de gré ou de force sur le champ de bataille. Quand Suzaku revint au pied de la cascade, on lui apprit qu’un noble du clan Shihan avait pris Hana pour en faire son épouse. Elle était partie, ne laissant qu’une lettre derrière elle.    « A mon guerrier,Voilà maintenant des mois que vous êtes parti sans donner de nouvelles. Bien que je sache qu’il n’existe aucune personne capable de vous tuer en ce monde, je ne peux m’empêcher de penser que vous m’avez oubliée ou remplacée. Le simple fait d’écrire ces mots me déchire le cœur, mais peut-être que nous n’étions pas destinés. Quelle sottise, de demander plus de quelqu’un comme vous, de réclamer plus grand exploit que vos victoires sur les pays voisins. Si nous routes ne se recroisent jamais, je m’en voudrais sûrement toute ma vie. Aujourd’hui j’en suis sûre, il m’est impossible d’aimer quelqu’un plus fort que je vous aime vous. Je pars aujourd’hui le cœur en miette épouser un seigneur pour essayer de résoudre le conflit de l’intérieur. Comment pourrais-je vous mériter, vous, le plus grand guerrier du monde, sans jamais gagner une bataille de mes propres mains ?Hana. »La légende raconte que le cri de rage de Suzaku retentit dans tout Pandala. Le Guerrier Rouge fonça vers le Dojo du Vent. Sur son chemin, il mit hors d’état tous les guerriers qu’ils croisaient sans même qu’ils aient le temps de réagir, aveuglés par le voile rouge. Un témoin raconte qu’il courait parmi les champs de bataille en assommant les gens en leur jetant le grain de riz de toutes ses forces. La force du Guerrier Rouge était telle. Hana allait épouser Hanshi, avait-il appris sur le champ de bataille, et Shihan fomentait une tentative d’assassinat au mariage. Le Guerrier Rouge pénétra dans le dojo au moment de la fin de la cérémonie. Hanshi et Shihan se battaient et Hana était terrifiée, en boule dans un coin. Aerdala était la terre la plus puissante et Hanshi et Shihan ses meilleurs guerriers. Suzaku se battait contre les deux en même temps. Il terrassa les deux guerriers en même temps.Lorsque les témoins regagnèrent la scène, Hanshi et Shihan étaient inconscients sur le sol, et au milieu se trouvait un grain de riz. Lorsqu’ils se réveillèrent, les deux guerriers s’étaient réconciliés et décidèrent de tenir le Dojo du Vent en attendant le retour du Guerrier Rouge, et que personne ne mourrait de faim en Aerdala. Le grain de riz était au Dojo, et ils ont décidé de l’exposer à tous, le symbole de l’unitié d’Aerdala. Le Guerrier Rouge veille sur nous.»

Jin avait bu chacune des paroles de son grand père, et était assis bouche ouverte sans savoir quoi dire. Il sortit en courant en direction du musée : il voulait revoir le grain de riz. Il passerait le restant de ses jours à en raconter l’histoire à tous les habitants d’Aerdala. Cette nuit-là, en courant vers le musée, une ombre passa devant lui. Jin aurait juré avoir vu un voile rouge.
 
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Non mais sérieux 2h a recopier mon texte pour un bug du site .. J'ai envie de pleurer. Personne vois ce que j'ai écris?
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Silencieuse, assise dans un recoin sombre de la salle du musée loin de tous les regards, une jeune sacrieur écoutait les témoignages qui se succédaient sur l’estrade. Les douziens absorbés par les récits, tous plus extraordinaires les uns que les autres, ne remarquaient pas son air triste, son visage percé de haine et de douleur – probablement car c’était face courante chez les disciples de la déesse sanguinaire.

Alors que certains s’évertuaient à retracer les origines divines du grain de riz exposé ce jour au grand public pour la première fois comme une relique probablement aussi ancienne que le monde lui-même, d’autres témoignaient avoir été en contact direct avec lui. Certains en vantaient les qualités magiques, contant que le grain leur avait apporté richesse, prospérité et fécondité ; d’autres encore invitaient le public à se méfier du grand pouvoir de destruction qu’il possédait, arguant qu’il leur avait apporté mort, destruction et avidité toujours plus grande et inassouvissable.

Pour sa part, la jeune sacrieur en possédait une toute autre version. Une version qui ne vantait ni les pouvoirs bénéfiques du grain, ni ses capacités maléfiques. Une version qu’elle ne souhaitait pas partager devant tout ces gens, innocents, naïfs, prompts à croire milles et une légendes toutes plus invraisemblables les unes que les autres. Car elle-même ne savait pas si ce qu’elle avait vécu relevait de son imagination ou si cela avait véritablement eu lieu.




C’était, lui semblait-il, il y a déjà bien longtemps, alors qu’elle venait tout juste d’acquérir sa première hache, achetée avec les kamas qu’elle avait durement gagné en travaillant les champs. Tantôt elle était employée l’été pour la moisson des blés dans les champs de Cania, tantôt elle travaillait les rizières à l’arrivée de l’automne en Akwadala, pour finir l’hiver à Frigost à récolter les frostiz.

A l’automne de sa seizième année, elle quitta la maison familiale et ses sept frères et sœurs, le cœur enflé d’impatience. De loin, les récoltes de riz étaient ses favorites. Il régnait à Pandala une atmosphère tranquille, un calme paradoxal quand on savait que ses habitants étaient parmi les plus fêtards de tout le monde des Douze. Les journées là-bas étaient empreintes de sérénité reposante malgré le labeur, tandis que les soirées voyaient l’abondance et l’excès régner en maître. C’est lors de sa toute première saison à l’âge de quatorze ans qu’elle avait pris sa première cuite au lait de bambou, souvenir mémorable qu’elle n’avait jamais avoué à ses parents.



Cette année-là donc, elle embrassa sa fratrie et ses parents devant le zaap des roulottes près duquel elle vivait. Comme chaque fois qu’elle partait en voyage, sa mère lui avait préparé des michettes croustillantes, un peu de lait de dragodinde et de la gelée à la fraise.


« - Sois prudente, lui recommanda la iopette en la serrant dans ses bras.

- Ne t’inquiètes pas mamoune, je serais revenue dans moins d’un mois.

Son père s’entailla la paume, et avec le liquide rubis qui s’écoula de la plaie, il traça un cercle sur le front de sa fille.

- Que la déesse Sacrieur veille sur toi ma fille. »

Se reculant, elle adressa un dernier signe de la main à sa famille, tirant sa langue doublement fourchue à ses rouquins de frères et sœurs iops qui se chamaillaient déjà pour savoir lequel d’entre eux aurait le privilège de prendre la chambre de leur ainée pendant son absence. Puis elle se laissa basculer en arrière dans les tourbillons vaporeux du zaap.




Ses yeux translucides perdus dans ses souvenirs, elle entendit à peine l’intervention de Leofurys qui souleva pourtant de bruyantes acclamations.

A son arrivée sur la terre des pandawas elle s’était rendue comme à son habitude à la ferme des Xinao, chez qui elle travaillait, et qui lui offraient le logis. Cette famille était passé par de terribles épreuves contées plus tôt par un vieil enutrof : leur fils Dinopan s’était fait tuer dans une attaque de mercenaires barbares, n’ayant que le temps de laisser à sa mère un unique grain de riz, qui permit aux pandawas de restaurer leurs terres qui avaient été détruites. Les Xinao étaient aujourd’hui trop vieux pour s’occuper de la ferme seuls et dépourvus de descendances ; ils employaient donc chaque année de jeunes douziens en quête de kamas.

Généralement les mêmes adolescents se succédaient plusieurs années consécutives jusqu’à l’obtention de leurs diplômes, et formaient rapidement une bande amicale. Cette année encore, elle retrouva le jeune zobal Kieran, la belle crâ Ana, et le petit eliotrope Noah, avec qui elle s’était liée d’amitié deux ans plus tôt. Ravis de se retrouver, les adolescents se mirent efficacement au travail dès le lendemain de leur arrivée à la ferme, dans la bonne humeur qui les caractérisaient.



Une semaine était presque passée, dans l’élan habituel de rigueur aux champs et de bonnes poilades le soir venu à la taverne du coin, quand la vieille mère Xinao vint les interrompre un matin.

Elle était accompagnée d’un jeune eniripsa aux ailes semblant faites de diamants. Leurs reflets argentés donnaient presque mal aux yeux, mais leur beauté était à couper le souffle. La jeune sacrieur qu’elle était fût immédiatement subjuguée par la beauté évanescente qui se dégageait de lui.

« - Les enfants, l’introduisit la mère Xinao, voici Salomon. Il va travailler avec vous à partir de maintenant. Je ne doute pas que vous lui montrerez comment cultiver les plants de riz. A tout à l’heure ! »


Comme en transe, elle ne réagit pas immédiatement et ce furent ses compatriotes qui accueillirent le nouveau venu avec enthousiasme, alors qu’elle reprenait lentement le travail en évitant de relever la tête.

Lorsque vint l’heure de rentrer prendre une bonne douche, elle fût la première à s’éclipser.

Elle avait toujours été réservée et discrète pour une sacrieur. N’ayant pas connu son père biologique, elle avait été élevée par une mère iop et un beau-père sram qu’elle avait toujours considéré comme son père. Par conséquent, elle avait hérité du côté discret et tempéré de son père, tout en conservant le caractère joyeux et tête brulée de sa mère. Ainsi, si elle paraissait timide aux premiers abords, elle ne tardait jamais à dévoiler sa face exubérante après quelques rencontres. Mais jamais elle n’avait ressenti envers autrui ce qui l’avait submergée lorsqu’elle avait aperçu Salomon.



Elle tourna le robinet de la douche du côté droit, et s’avança sous le jet d’eau glaciale, pour tenter de remettre ses idées en place, mais elle restait troublée. Elle tourna alors le robinet à gauche, laissant l’eau la réchauffer, agréablement d’abord, puis de plus en plus difficilement à mesure que la température augmentait. L’eau fumait de plus en plus, laissant des marques rouges le long de son corps, tant et si bien qu’elle se sentait comme anesthésiée.


« - Mais qu’est-ce que tu fais !!

Le cri la tira de sa torpeur, alors qu’Ana lui agrippait le bras pour la tirer violemment hors du jet brûlant.Hébétée, elle ne réagit que lorsque la belle crâ lui asséna une violente gifle.

- Je... murmura-t-elle en posant la main sur sa joue.

- Tu es brûlée ! Enfile des sous-vêtements, on va aller soigner ça ! »

Ce n’est que lorsqu’elle avait aperçu son reflet dans le miroir qu’elle avait vu les marques rouges et boursoufflées qui couraient le long de son corps, alors que petit à petit la douleur qui engourdissait son cerveau commençait à se réveiller.


Une fois ses sous-vêtements enfilés, Ana la prit par la main et l’entraina dans la maison, à la recherche de quelqu’un pour l’aider.

Elle trouva la mère Xinao à la cuisine, en train d’éviscérer les perches qu’elle servirait au repas.

« - Par Pandala ! S’exclama-t-elle en voyant les blessures de la jeune femme. Que s’est-il passé ?

- Je ne me suis pas rendue compte que l’eau était si chaude, répondit-elle tandis que la vieille dame fouillait dans ses tiroirs à la recherche d’une potion de fwaîcheuw.

- Vous les sacrieurs, vous pourriez perdre un bras que vous ne vous en rendriez pas compte ! Où est cette maudite... ? »

La mère Xinao s’interrompit soudain, sembla se figer quelques instants, avant de se retourner, une fiole minuscule entre les doigts, dont le contenu était invisible aux yeux des deux jeunes femmes.Elle se rappellerait de cet instant toute sa vie. Ce moment où elle le vit pour la première fois. Enfin, elle se rappellerait de cette journée toute sa vie, car les deux rencontres qu’elle y fit firent basculer son destin irrévocablement.



« - Ce grain de riz est celui que mon fils m’a donné avant de mourir, expliqua la vieille dame en mettant de l’eau à chauffer sur le feu. Je ne saurais comment l’expliquer, mais c’est comme s’il avait le pouvoir de donner la vie, continua-t-elle en enlevant l’eau chaude du poêle, et en y jetant le grain de riz. C’est à partir de lui que nous avons pu replanter nos cultures. Ce qui demeure étrange, ajouta-t-elle en versant l’eau bouillante dans une tasse, c’est qu’une fois germé de son premier plant de riz, et une fois les toutes premières céréales récoltées, le plant à semblé mourir sous nos yeux ébahis, tandis que le grain semblait intact. Bois, ordonna-t-elle. Je n’ai pas pu m’empêcher de le garder, là, pendant tout ce temps.

Elle fut secouée d’un rire amer.

- Je suppose qu’il a su me faire comprendre que j’aurais encore besoin de lui un jour. Parfois, ajouta-t-elle, je me dis que ce grain de riz est imprégné de l’esprit de mon fils.


Alors que l’eau qu’elle buvait était inodore et sans goût, elle assista ébahie à la cicatrisation presque imperceptible de ses brûlures.

- Nom d’un carquois, s’exclama Ana en écarquillant les yeux.

Les brûlures avaient presque disparu à présent, et les trois femmes entendirent un bruit sourd provenir du couloir. Ana pencha la tête dans l’encadrement de la porte pour voir ce dont il s’agissait.

- Oh mince ! Aidez-moi ! »


Les deux autres se précipitèrent, et eurent la surprise de constater que Salomon était effondré par terre, à demi-conscient, la peau blafarde, presque translucide. A elles trois elles le soulevèrent et l’allongèrent sur le canapé.

« - Que t’arrive-t-il mon garçon ? Demanda la vieille dame en le secouant légèrement par les épaules.

- Je... guérir... trop d’énergie, balbutia-t-il avant de s’endormir.

- Ah. Moi qui pensais que c’était mon riz magique qui t’avait guérie. Grand bien m’en fasse à croire à des sornettes pareilles.

- On devrait peut-être lui donner quelque chose ? Demanda la jeune sacrieur, qui se sentait soudainement mal, prise de culpabilité et... d’inquiétude ?

- Les eniripsas se régénèrent assez vite, ne t’inquiète pas, d’ici une petite heure il ira mieux. Tenez, aidez-moi à finir de préparer le dîner. Quant à toi, ajouta-t-elle en vidant la théière et en y récupérant le grain de riz, tu vas retourner d’où tu viens. »

Elle remit le grain dans son petit flacon, et le rangea dans un tiroir.



En repensant à tout cela, la jeune femme se leva, pour approcher le grain de riz d’un peu plus prêt. Il était tel que dans son souvenir, aussi lisse, aussi brillant, aussi petit et semblait tellement inoffensif.


Salomon s’était réveillé une heure plus tard, alors que tout le monde avait déjà fini le repas. Kieran, Ana et Noah étaient parti faire un tour à la ginguette du coin, mais pas elle. Elle avait attendue, assise seule dans la cuisine, le réveil du bel eniripsa.

« - Hey.

Elle releva la tête pour constater qu’il la regardait, debout dans l’encadrement de la porte. Dans la pénombre, elle ne distinguait pas ses traits lisses. Juste sa peau diaphane et ses ailes qui semblaient luire à la lumière de la demi-lune qui passait par la fenêtre.

- Tu as faim ? Lui proposa-t-elle en ouvrant la marmite qui contenait les restes du repas.

- Non. Juste soif, répondit-il en s’avançant dans la pièce pour se servir. Cette eau est chaude ? Demanda-t-il en désignant la théière laissée là.

- Elle est vide je pense.

- Non, il en reste un petit peu, constata-t-il en regardant à l’intérieur.

Il s’en servit une tasse, qu’il bu d’un seul trait.

- Elle est froide, dit-il d’une voix neutre. »


A mesure que la conversation avançait, elle se sentait de plus en plus mal à l’aise. Elle essayait toujours d’éviter son regard, qu’elle sentait pourtant posé sur elle.

« - Tiens, c’est bizarre, dit-il en récupérant quelque chose au fond de son verre. C’est ça le grain de riz magique dont elle parlait ?

Interloquée, elle releva vivement la tête pour constater qu’effectivement, le grain de riz se trouvait dans le creux de sa main.

- Mais... c’est impossible... Madame Xinao l’a rangé tout à l’heure.

Elle ouvrit le tiroir, en sortit la fiole, et constata avec effroi qu’elle était vide.

Il s’approcha d’elle et lui tendit le grain énigmatique. Lorsqu’elle récupéra le grain de riz, elle frôla ses doigts d’albâtre. Le contact l’électrisa, et des frissons parcoururent son corps tout entier, comme un million d’étoiles qui se serait posées sur son épiderme. Au même moment, elle eut l’impression de se noyer. Elle manquait d’air, et elle ne comprenait pas pourquoi. Suffoquant, elle tâta son visage pour constater qu’elle recrachait de l’eau. Salomon la rattrapa alors qu’elle allait s’effondrer sur la tome froide. Le grain de riz glissa entre ses doigts, rebondit sur sa clavicule, caressa sa poitrine voluptueuse, et se perdit au sol après avoir frôlé ses hanches généreuses.

- Ca va ? Demanda l’eniripsa en constatant que les spasmes s’étaient arrêtés.

Elle hocha la tête, choquée par ce qui venait de se produire.

- Nous ferions mieux d’aller nous coucher, dit-il en la prenant par les épaules. »



Il l’avait raccompagnée jusqu’à sa chambre, l’avait aidé à s’allonger, et après...



Après tout était flou dans sa mémoire, comme si elle essayait de se souvenir à travers la surface d’un lac trouble. Elle croyait s’être réveillée à un moment donné, en ayant eu la sensation d’avoir dormi cent ans. Elle pensait qu’elle s’était levée, mais en ayant ressassé cette nuit des dizaines de fois, elle était maintenant presque certaine qu’elle était restée immobile, comme tétanisée. Elle avait tourné la tête et aperçu le grain de riz sur sa table de chevet. Et comme possédé d’un esprit maléfique, il s’était mis à léviter, projetant autour de lui des ombres chinoises, des symboles qu’elle ne comprenait pas. Elle avait réussi à crier, crier si fort que quelqu’un était entré en trombe dans la pièce.

Salomon.

Il lui avait hurlé de s’enfuir, mais elle était toujours entravée par une force inexplicable. Elle s’était sentie soulevée par l’eniripsa, qui semblait à son tour recracher l’eau bu précédemment. Ses bras n’arrivaient pas à la porter, et ils s’écrasèrent au sol tout les deux, lui partiellement sur elle.

Etouffée par le poids du garçon, et aveuglée par ses cheveux sur son visage, elle ne sait pas exactement ce qui s’est produit cette nuit-là, sur le plancher de l’ancienne chambre de Dinopan. Elle se rappelait juste qu’il avait murmuré quelque chose à son oreille avant qu’elle ne perde conscience.



Lorsqu’elle s’était réveillée le lendemain matin, le soleil lui caressait le visage. Elle avait ouvert les yeux en repensant à cet étrange cauchemar. Et elle avait constaté que la pièce était cramoisie.

Des coulures rouge sombre s’étalaient le long des murs, des flaques se formaient sur le parquet, et elle avait des symboles anciens dessinés sur les bras et les jambes avec du sang.

Elle tenta de les effacer, mais ces marques étaient ancrées en elle, tatouées sur elle.

Alors qu’elle se relevait, elle perdit l’équilibre et retomba sur le dos. C’est à ce moment-là qu’elle sentit quelque chose d’inhabituel la chatouiller entre les omoplates. En se retournant face au miroir de la pièce, elle découvrit alors avec stupeur le grain de riz qui baignait dans une flaque de sang, et des ailes. Des ailes brillantes, argentées, presque transparentes, qui trônaient dans son dos.


Et un mot murmuré claironna à ses oreilles.

« Adieu. »
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Score : 31
Tandis que toute l'assemblée se regardait dans le blanc des yeux après avoir entendu milles et une histoires farfelues sur la légende du grain de riz, un Pandawa d'un certain âge, la tignasse ébouriffée et une allure à coucher dehors s'écria à pleins poumons : 

" NOM D'UN P'TI BAMBOU, C'TE GRAIN D'RIZ A SAUVÉ PLUS DE VIES QU'VOUS TOUS ICI POUR SÛR. J'EN AI PAR DESSUS LA CHOPE DE VOUS ENTENDRE SALIR SON HISTOIRE !"

Il captiva l'attention de tout le monde. Il s'avança vers l'estrade en grommelant dans sa barbe. Il peina à monter sur la petite scène, essoufflé il demande une chope d'un vulgaire geste de la main, bu 5 grosses gorgées et commença son récit : 

"Hum.. Humm...
C'te grain d'riz comme vous dites est légendaire. J'ai pu le voir de mes propres yeux, oui m'dame. 

Il y a une paire d'années, Pandala était une terre naturelle ou régnait la paix entre les Pandawas et les êtres vivant autour... Même si défois on aimait bien leur taquiner les branches, ça restait bon enfant. 
Mes parents étaient cultivateur de riz et on en vendait partout, la bourgeoisie de Bonta à Amakna s'arrachait not' délicieux p'tit féculent. 
Un jour, v'là qu'un marchand vient 'vec son p'tit  bambin raton tout mignon. Durant son séjour, tout l'monde au village s'occupait d'ce p'tit gars poilu. C'était vite devenu la mascotte. 
Un matin on r'trouve le raton tous seul sans son marchand, il s'était volatilisé, le bougre, en abandonnant le p'tiot. Ni une ni deux, on décida de l'adopter et tous le village s'en occupait. On l'avait appelé Tanukouï. Il était aux anges, j'peux vous l'dire. 

Il grandissait bien vite, il avait de l'appétit, ah ça oui. Il raffolait de not' bambou.
Un soir d'hiver, notre réserve épuisée, une bonne dame décida de le nourrir avec not' riz... Après ce jour Pandala n'a plus jamais été la même île. Il aimait ça bien plus que le bambou et en réclamait sans cesse. Il épuisait not' stock à lui tous seul, les bourgeois faisait la gueule et on perdait de l'argent. 
On essayait tout ce qui était possible pour lui faire arrêter de manger l'riz du village. Impossible, si on lui donnait pas il commençait à êt' violent, un vrai tyran poilu. A cette époque il avait atteint sa taille adulte, il faisait une tête de plus que moi au moins, pour sûr.  

Le jour fatidique arrivait, on avait plus un grain d'riz en stock, on était tous le ventre bien vide. L'raton s'énervait sur tout l'monde, il était dev'nu incontrôlable et personne n'arrivait à l'calmer. Après quelques jours il commença à séquestrer des habitants du village dans la forêt, il voulait du riz cet estomac sur patte. 

C'est là qu'un vieillard du village demanda aux plus costauds, dont moi, de l'accompagner pour aller voir Tanukouï, on pensait qu'le vieillard était cinglé et qu'le raton allait nous tuer, mais fallait sauver nos amis. Arrivé là-bas, l'raton était énorme et fou d'rage. L'vieillard lui dit que si il arrive à manger c'te grain d'riz il aurait plus jamais faim. Il l'avala aussitôt. Il devint tout bleu, eu pleins d'boutons. Il se tournait dans tous les sens et vomit le grain de riz avant de tomber dans les pommes. 

On l'emmena loin d'ici dans une grotte vers Terrdala, et on a plus entendu parler d'lui. Apparemment quelqu'un l'aurait vu avec une meute à lui, pour sûr que c'est un mensonge, il doit êt' mort à l'heure qu'il est. J'ai jamais su c'que l'vieillard avait fait d'ce grain d'riz mais pour sûr qu'c'est c'lui là. Il est magique moi j'vous l'dit."
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Score : 823
Alors que le beau soleil du jour s’anuitait,  tous les yeux, même ceux de la famille d’araknés installée au premier rang,  s’étaient tournés vers le nouvel arrivant.

Semblant avoir traversé les siècles, un vieil ermite encapuchonné s’était approché du muséologue dans une telle grâce que ce dernier ne l’aurait même pas remarqué si toute l’attention n’était pas portée sur lui.

Sans jeter un regard à la foule et pourtant en fixant chacun de ses membres, il prit la parole :

         -  J’ai vécu chacun de vos récits. J’étais là. Même si le besoin ne semble pas s’en faire ressentir, j’atteste que chacun de vos contes est authentique.

Sa voix était fluette, vibrante et rapide mais chaque mot était intelligible, comme si une minute s’écoulait entre chaque son prononcé.

Après s’être assuré qu’il avait l’écoute de l’auditoire, l’homme retira sa capuche pour dévoiler un visage de xélor marqué par le temps et reprit la parole :
          -    Parfois objet de crime, souvent objet de désir et toujours objet de puissance dit-il en regardant chaque spectateur dans les fenêtres de leurs âmes.

Il était possible d’entendre le silence, de voir l’obscurité qui tombait peu à peu sur la scène rendant ce grain de riz si puissant presque invisible.

          -    Voilà 152 ans que je recherche ce grain de riz. Non pas pour l’utiliser, non pas pour le cacher mais pour le détruire. 

Le dernier mot avait été sifflé, appuyé avec tant de haine que les dieux eu même eurent des frissons.
L’homme tenait en respect toute l’assemblée, personne n’osait parler ou même respirer.

Après un énième moment de silence le vieil homme reprit :
          -   Les années sont passées, les histoires ont été racontées. Vous pouvez constater qu’une si petite chose peut faire autant de dégâts que le dieu Iop lui-même. Ne soyez pas aussi avide que vos aînés, soyez meilleur qu’ils ne l’ont été et que je le fus moi-même. Si je le souhaite je peux disparaître tout de suite avec l’objet de votre attention. Mais qu’en ferais-je ? Pourrais-je le détruire ? Le mettre en sûreté ? Le cacher ? Ma seconde est comptée. Je ne vous dirai qu’une chose : prudence !

Sur ce dernier mot chaque membre de la foule repris son souffle, l’étranger n’était plus là, il avait disparu aussi que mes derniers kamas suite à l'achat d'un code audiotel au zaap d'Astrub en 2005.
La vie reprit son cours, une seconde s’était écoulée depuis l’apparition de l’homme au capuchon.
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Score : 3459
*Un Pandawa d'une quarantaine d'années s'approche à son tour du Grain de Riz pour prendre la parole, mais reste muet quelques secondes en le fixant.*


Il est beau quand même ! C'est la première fois que je le vois réellement.

Bonjour, je suis Tashigo, descendant d'une famille de brasseurs, même si je n'ai pas suivi cette voie. J'ai préféré me tourner vers quelques autres activités, comme le maniement des armes. C'est plus utile au quotidien je vous l'avoue !

L'histoire que je vais vous conter m'a été racontée par ma grand-mère et doit se situer peu après celle de la disciple de Sram en rose. Cela me semble à peu près cohérent.

Mes deux grands-parents, Sateau et Mirinne venaient de se quitter, mon grand-père n'était pas vraiment présent ni pour elle, ni pour le reste de la famille et leur amour s'était terni avec le temps. D'où le fait que ma grand-mère avait décidé de se lier avec un nouvel homme, Some Baye, qui était garde du village.

Cependant, mon aïeul n’avait pas réellement apprécié cette séparation et désirait se venger. Il avait plus d’une fois entendu parler des légendes du Grain de Riz, arme ultime de l’assassinat, durant ses soirées à la taverne de Pandala. L’histoire l’inspira fortement, mais une simple mise à mort ne mènerait à rien pour lui et il devait prouver à ma grand-mère qu’ils étaient liés par le destin.

Dépensant des sommes colossales, il fit l’acquisition du Grain de Riz dans les marchés noirs, sans que je n’aie plus de précisions. Je n’ai pas eu sa version directe des faits, seulement celle de ma grand-mère, quelques notes et des rumeurs recoupées autour de son histoire. Il prenait cependant ainsi le risque de se faire pourchasser par une armée de disciples de Srams et n’avait que peu de temps pour préparer son plan.

Une partie de son atelier fut alors scellé et privatisé à une seule tâche, la création pourtant si commune, représentative de l'un de arts ultimes des Pandawas : l’alcool.

Dans le vieil atelier du village, mon grand-père avait placé ses sacs de riz, où avait été mélangé le Grain de Riz, dans es bacs destiné à ses productions privées. Le riz fut lavé et gonflé à l'eau, prenant ainsi un volume et une texture plus adaptés. Au feu du vieux four, dans quelques récipients métalliques, le tout fut cuit à la vapeur. De quoi, j'espère que certains Pandawas ici présents ont compris, en produire l'un des alcools les plus habituels de notre île.

Au moment de presser le riz, dernière étape avant l'attente, il sentit cependant une résistance, quelque chose de beaucoup plus dur que le reste et pourtant si petit... Le Grain de Riz était là, toujours intact et aussi blanc qu'à l'achat. Au moins il n'y avait plus de doute : c'était le véritable Grain de Riz.

Qu'importe pour lui, s'il ne pouvait appliquer cette méthode, il en restait bien d'autres.

Reprenant tout à zéro et armé cette fois-ci des grands tonneaux en bambou de l'atelier, il fit macérer pendant plusieurs jours son riz, accompagné du fameux Grain de Riz, de fruits, et même de pandouille, espérant que la magie de ces graines pourrait avoir un effet sur l'artefact.

La levure fut ajoutée et deux semaines plus tard, la récolte était prête : une odeur forte, mais encore incomplète, avait envahi les environs de l'atelier. Mais ce fut surtout un cri de colère que les Pandawas de la rue entendirent : le Grain de Riz était encore intact. Qu'importent les effets de la pandouille.

Pour son dernier essai, il fit l'acquisition de vieilles jarres de pierre, reliques du passé du peuple Pandawa, et y fit bouillir le riz, après l'avoir trempé et ajouté quelques accompagnements. Une cuisson particulière et unique, non pas dans l'atelier des brasseurs, mais au-dessus de la lave de Feudala. Cela prit trois jours, pendant lesquels il surveilla sans relâche les chaînes de métalliques qui soutenaient les jarres et la présence d'éventuels voleurs.

Plusieurs semaines de fermentation plus tard, l'alcool put être extrait par pression et cette fois-ci : pas de Grain de Riz restant. Mon grand-père avait alors réussi : l'Alcool du Grain de Riz.

La seconde partie de son plan pouvait alors débuter, il offrit les bouteilles à son ancienne femme et son nouvel amant, leur précisant qu'il n'accepterait jamais qu'un homme qui ne tient pas ces bouteilles puisse élever ses enfants à sa place.

Some Baye était un guerrier du village moins porté sur la boisson que la plupart de ses collègues, mais prit son courage et bu la liqueur. À peine quelques gorgées le firent tomber au sol, mon grand-père cru à la réussite de son plan, mais la toux de son rival lui fit comprendre le contraire : il était encore en vie et tentait de se relever.

Surpris, mais voulant prouver qu'il tenait mieux l'alcool que Some Baye, Sateau mon grand-père prit la bouteille en en avala plusieurs gorgées à son tour. Une toux violente le prit, sous les yeux déjà effrayés de ma grand-mère, avant de s'étouffer et de tomber au sol, mort. Un petit objet, parfaitement immaculé et effrayant, fut éjecté : le Grain de Riz était là.

Some Baye, mon beau grand-père et Mirinne ma grand-mère déposèrent cette céréale de malheur à la statue de la Déesse Pandawa et continuèrent leur vie. Ma famille prit alors la direction de l'art des armes et abandonna l'art de l'alcool. Tout ce que je sais ne vient que de nos livres restants et des quelques notes que j'ai pu découvrir.

Nous n'avons jamais su comment le Grain de Riz était apparu dans la bouche de mon grand-père. Peut-être qu'il s'était reformé après sa disparition, ma grand-mère en tout cas y croyait, c'était un signe de bonne destinée de la déesse et il n'y eut d'ailleurs plus de malheurs depuis pour nous.

*Tashigo salue les divers visiteurs du musée et retourne à sa place, non sans observer avec curiosité et intérêt l'épée de la Iop caramélisée.*
 
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Score : 49
L’honnête homme 

Dans un habit orné d’or et de carmin, un Pandawa aux yeux ternes mais perçants tira une dernière bouffée de sa pipe avant de s’avancer devant le muséologue. Il prit la parole ainsi que le contrôle de l’assemblée en soufflant les mots suivants :

« Le monde est composé de bien des valeurs et de principes qui se juxtaposent, se lient, et parfois se fracassent les uns contre les autres. L’histoire de ce grain de riz en est un exemple, que je vais tacher de-vous conter. 

Peut-être connaissez-vous la charmante bourgade de Loivale-Reppet, au nord-est d’Akwadala. Si, aujourd’hui ce village est connu pour sa prospérité et son opulence, il était une époque où Loivale-Reppet n’était que misère et désolation. La raison principale de cette infortune avait pour origine la stérilité des rizières qui bordaient les contours de la ville. Le ventre creux et les bras ballants, les habitants avaient fait appel à la science des quelques Steamers dont le chemin se perdait dans la contrée. Système d’irrigation, engrais, panneaux photovoltaïques, filtrage de l’eau … rien n’y fit. 

Mais, me diriez-vous alors : « N’y avait-t-il pas d’autres mets à se mettre sous la dent ? Des poissons, des plantes, du gibier permettant de se remplir la panse? ». Sur ce point je vous donne raison, malheureusement Pandala est une région où la flore est singulière et le gibier redoutable, et surtout, une ville est riche des personnes qui y font escale. Or, la pauvreté avait largement abimé la ville de bien des maux : maladie, famine et insécurité. Entendez-bien, le manque de nourriture avait fait fuir les jeunes en quête d’avenir, éteint les anciens trop fragiles, et attiré les brigands capable de vendre un bien cinq fois son prix. 

Néanmoins, un jeune Loivale-Reppetois, Tripack Kabalni tenait à cœur la sauvegarde de sa bourgade et avait pour plus grand souhait d’en faire le nouveau carrefour commercial de Pandala. Il croyait dur comme fer que le riz pourrait tous les sauver. D’ailleurs, lorsqu’il avait l’occasion de caresser ses papilles avec du fromage de boufette, il souriait, ravi, et indiquait que« bien manger, c’est le début du bonheur ».

Tripack était un jeune homme hardi qui ne croyait pas aux concessions. Enrichir sa ville et la sauver de l’infamie étaient pour lui la promesse d’un destin enrobé d’or et d’influence.  Pour faire subsister son village, il tabla sur un plan rapide lui apportant un succès foudroyant au risque de mettre en péril son intégrité : soudoyer le Dieu Sram de voler un grain de riz dans le jardin du Dieu Sadida. Par l’intermédiaire d’anciennes connaissances installées à Brakmar, Tripack put contacter Sram et le rencontrer dans une taverne miteuse au nord de la ville. Sram accepta sans hésiter, indiquant simplement qu’en échange de ce service, Tripack s’engagerait à lui reverser une commission finale, « lorsque les caisses de Loivale-Reppet craqueront sous le poids des kamas produit du fruit de ce grain de riz». Le lendemain Sram retrouva Tripack, lui tendit le riz et lui rappela ceci : « n’oublie jamais que tout a un prix ». 

Trois mois plus tard, les premières moissons eurent lieu. Aucun doute, le riz était magique : il poussait plus vite et en abondance. Et surtout, croyez-moi, son gout était inimitable. En quelques mots, Tripack Kabalni avait produit un miracle. 

La première année fut la plus belle. Après des années terrés chez eux, les habitants redécouvrir la joie immense que de recevoir des amis autour d’un joli bol de riz. (Imaginez-vous pouvoir rester confiné chez vous, sans pouvoir circuler, par peur de l’autre et par manque de vivres ? Quelle vie…) Du petit bourgeois au plus démuni, tout un chacun avait retrouvé l’essentiel qui façonne la vie : un travail et de quoi se nourrir. 

Cette même année, Tripack Kabalni fut nommé maire de Loivale-Reppet. Avec sa fiancée, Ellebasi, il décida d’offrir plus à son village qu’il chérissait tant. Il restait tant à faire ! Il commença par faire disparaitre ces malfrats qui avaient installé un climat de terreur. Fini les prêts usuriers, la vente de protection, et le commerce de riz et autres denrées périmées. Pour cela il acheta les services d’une milice armée entrainée à Bonta.

Il fallait également retracer les routes du commerce, rejoindre Pandala, puis Astrub et pourquoi pas Bonta et Amakna. Exporter le fruit du labeur de ses braves paysans, voilà ce qui permettrait de payer les miliciens, et de diversifier le troc de nourritures. 

Mais voilà que les caisses de la ville se remplissaient doucement. Tripack, malicieux et sournois, eu alors à l’esprit de ne pas laisser les caisses gonfler trop vite par cette affluence de kamas. Il prit l’habitude soutirer quelques kamas mal rangés, mais cela ne suffisait pas … Dès lors, il s’employa à les dépenser pour redorer la ville. 

Tripack consulta alors ses citoyens pour qu’ils trouvent ensemble une nouvelle activité qui pourrait enrichir leur sénéchaussée maintenant qu’ils disposaient de quelques bénéfices à dépenser. Tous étaient d’avis de s’élancer dans le commerce de l’hôtellerie et de la restauration : le riz de Loivale-Reppet était si savoureux que personne n’osa douter une seconde de la réussite d’un tel projet. Et soyez-en certain, chacun avait pour souhait de s’adonner à la tâche pour aboutir à ce conte de fée. Après des années à dépérir de faim et d’ennui, tous voulaient donner la main à la pâte.  

La construction des hôtels et des restaurants débuta. Chacun y mettait du sien : de la maçonnerie à la comptabilité, chaque citoyen possédait un talent et une appétence pour un domaine particulier. Sans oublier les paysans, qui turbinaient dans les rizières.  

En parallèle, Tripack débuta une phase de communication pour faire connaître sa ville et attirer une nouvelle clientèle. Il entama un voyage palpitant accompagné de ses plus fervents amis et serviteurs, dans lequel il rencontra les notables de chaque ville. Il employa les services de quelques Eliatropes pour effectuer ses rencontres rapidement.  

Tout se mit en branle dans un rythme infernal et grisant : une fois les travaux terminés la ville ouvrit grand ses remparts, les touristes arrivèrent doucement, mais leurs nombres ne cessèrent d’accroitre. Tout le monde voulait gouter le riz de Loivale-Reppet. Un produit frais, tout juste coupé puis préparé par les cuisiniers de la ville. Riz de cococo, risotto de cawotte, riz au lait de bambou, paella de grevette, riz fermenté, sorbet de riz…  

Tous ceux qui firent escale à Loivale-Reppet laissaient une trace de leur passage, par le sifflement de leurs kamas, bien sûr, mais aussi parfois de par leurs témoignages, leurs savoirs-faire ou leurs cultures. L’écho des kamas retentissant dans Loivale-Reppet enchantait la ville d’un bourdonnement alanguissant. 

Pourtant, il en fallait toujours plus ; pourquoi ne pas enorgueillir la ville de culture ? Un musée, un théâtre, des écoles, de grandes structures aptes à détendre ses habitants lorsque ces derniers finissaient leurs longues journées de travail. C’est ici que Tripack démontrait une intelligence hors-norme, puisqu’en plus de l’embellir, il faisait circuler les kamas de la caisse de sa ville. Discrètement, il prenait le contrôle de la bourgade et de sa richesse. 

Les années passèrent et le visage de Loivale-Reppet avait changé. Alors qu’elle n’était avant qu’une escale sombre de Pandala, elle était devenue la ville d’or et d’argent. Elle s’est développée bien sûr, et repeuplée, car ceux qui y vivaient étaient heureux de l’éminence de ses rues et allées. Les rizières s’étaient également agrandies, et avec elles le nombre de paysans à y besogner.  

Tripack avait offert à cette ville une nouvelle estime d’elle-même, un nouveau souffle et un nouveau rythme. On y courait dans tous les sens, à toute berzingue, personne n’avait le temps de souffler quelque peu, car il y avait toujours tant à faire. Néanmoins, ne vous détrompez-pas, tous les Loivale-Reppettois respiraient un même air de complaisance et de quiétude. En effet, Tripack veillait sur eux, à l’écoute, il saurait toujours trouver une solution en cas d’essoufflement. Mais Tripack faisait autant circuler les kamas dans sa ville que dans sa poche… 

Tripack Kabalni était devenu un homme déchiré par son amour envers sa bourgade et celle qu’il destinait à son avarice. Son travail pour la ville démontrait un investissement personnel important, mais un voile de cupidité avait déjà envahi ses pensées. Lorsqu’il songeait à cet ancien contrat passé avec Sram un nuage d’inquiétude enveloppait son âme. Il refusait de se défausser de cette commission dont il n’avait connaissance ni de la forme ni du jour où elle viendrait le sanctionner. Tripack Kabalni était au sommet d’un pyramide de satisfaction et refusait de perdre une once de son triomphe.  

Alors, pour éloigner le jour de ces morbides retrouvailles avec Sram, Tripack continuait de dépenser autant de kamas que la ville ne pouvait en gagner. L’équilibre instable dans lequel les kamas circulaient dans les coffres de la ville et dans sa poche devint monnaie courante, au point d’endetter Loivale-Reppett auprès de quelques banques.

Il alla plus loin encore en s’enquillant d’un commerce dans la dimension d’Enutrosor. Dans le plus grand respect du secret, il déplaça des monticules de kamas dans des coffres aux trésors. On dit même qu’il alla jusque cacher des kamas sous son matelas… 

Les années continuaient à défiler à un rythme toujours plus frénétique. Tripack culminait dans son rôle de chef de ville où tout croissait : la beauté de sa ville, la production de riz, sa richesse personnelle … et le mécontentement de ses habitants. 

Loivale-Reppet avait une fois encore changé d’aspect. Chacun se tuait à une tache qu’il ne comprenait plus. Les restaurants et les hôtels fourmillaient d’une vie palpitante, au détriment de ceux qui y servaient. Les rizières s’étalaient sur des pertes de vues et les paysans s’usèrent chaque jour un peu plus. L’acrimonie et l’animosité avait fracassé les portes de la ville à tel point que les paysans se faisaient surnommer « grain de riz ». La bienveillance, quant à elle, était tout bonnement portée disparue… 

Surtout, Tripack s’était éloigné de son peuple. En effet, le mensonge l’avait isolé de ce qu’il chérissait. L’éclat flamboyant de Loivale-Reppet traduisait l’accomplissement du but que Tripack s’était initialement fixé. Seulement, il s’était enivré de bien des senteurs qui changent les hommes qui les côtoient de trop près, comme le pouvoir, le prestige etle faste. Tripack Kabalni était atteint d’une forme de folie. Une folie douce et pernicieuse qui s’habille de la peur de ceux qui en sont atteint.  

Alors que les caisses de la ville grelottaient sous le poids de l’or, Sram se s’était toujours pas montré. 

Un matin de printemps anodin, sans que l’on ne sut jamais ni comment ni pourquoi, les forces de l’ordre du Roi d’Amakna se présentèrent aux portes de Loivale-Reppet. Cette prospérité était devenue bien trop étrange, et les conséquences bien trop bruyante. On demanda à une grappe de valets, habiles avec les chiffres et un boulier, d’inspecter les finances de la ville. Quelle ne fut pas la surprise quand ces derniers mirent la main dans le pot aux roses ! Des monticules de kamas qui n’avaient jamais trouvé leurs places dans les caisses de la ville. La fortune de Tripack fut révélée : des coffres à Enutrosor, son empire immobilier dans les îles d’Otomaï et de Vulkania, l’endettement de la ville couvrant ses frais de réceptions (encore des kamas sous son matelas ?!) … 

Tripack n’eut d’autre choix que de tout raconter devant les tribunaux de Pandala. Heureusement, il avait de quoi s’offrir les plus éminents Feca maître dans l’art du plaidoyer.  

Il récita sa rencontre avec Sram, l’échange du grain de riz, sa peur de décevoir et son amour pour sa ville. Il s’excusa mille fois de ce qu’il pensait être un agissement normal, et surtout qu’il n’était pas le premier à coffrer des kamas dans les salles d’Enutrosor. Qu’après tout, il avait le droit lui aussi de se faire du blé. La folie l’avait acquis, et l’espoir d’un acquittement n’était plus qu’un doux rêve inaccessible.  

Le jugement fut tranché et Tripack parti s’installer dans les plus belles geôles de Pandala. Les habitants de Loivale-Reppet étaient meurtris par le mensonge de leur chef. Ils le savaient fou et avaient conscience que c’était sa vivacité qui avait permis au village de guérir de l’infamie, mais ils étaient épuisés par le travail, l’outrage et la trahison. 

Dans le même temps, le tribunal invita Sadida à récupérer ce qui lui appartenait. Sous l’œil désemparé des habitants village, il détruisit l’intégralité des rizières et ne laissa qu’un seul grain de riz, symbolisant le germe qui avait permis à cette histoire de débuter. Puis, se tournant doucement vers le peuple bouleversé, il chuchota au vent ces quelques paroles « Mon riz n’a de magique que son pouvoir de réunion. Vous avez cru à des miracles que vous avez-vous-même créer. Vous étiez seuls, isolés de vos envies et délaissés par vos ambitions. Tripack Kabalni a su vous réunir et vous inciter à rêver à tous les sens que vos existences peuvent prendre. Plantez n’importe lequel grain de riz et honorez le du même travail que vous avez consacrez au mien. Le résultat sera le même, soyez en averti. » 

Dans l’écho de son départ, on entendit le rire glacial du Dieu Sram. 

Peu de temps après cet évènement troublant, Tripack fut sorti des geôles de Pandla. Les juges admirent qu’un fou est un malade qui n’a pas sa place en prison. 

Les habitants de Loivale-Reppet avaient un avis partagé sur la libération de Tripack Kabalni. Certes, il avait pillé les caisses de la ville, mais il avait surtout permis de les remplir. Il en avait certainement trop pris, et jamais rendu assez pour qu’un jour les comptes soient équilibrés, mais depuis la ville était prospère. Pour d’autres, il était un escroc comme bien d’autres, qui n’a fait qu’asservir un peuple pour en tirer profit. 

Le grain de riz que vous avez devant vos yeux est celui laissé par Sadida. Il symbolise les dérives de quelques bonnes intentions et de mauvaises raisons. 

Une dernière chose, j’étais un des avocats à vouloir à le défendre devant les tribunaux de Pandala. Cette histoire, je ne l’ai pas sorti de mon chapeau, au contraire je me suis battu pour le libérer, mais sa folie avait rongé sa raison. Mon nom est Panda Morreto, n’oubliez jamais que tout a un prix. » 

Son récit achevé, il se tourna vers une des baies vitrées qui donnaient accès à la cours du musée. Son auditoire accompagna son regard, et tous pu apercevoir un homme vêtu d’un habit rose danser, heureux, dans les rues de Loivale-Reppet.
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Cela fait quelques jours que mon petit bout de chou s’ennuie à la maison. Parti en exploration en Terrdala avec ses amis la semaine dernière, il s’est blessé en tombant d’un arbre. Il est encore jeune, il est maladroit… Son grand rêve, ce serait de devenir grand aventurier, aussi grand que Kérubim Crépin. Mais à chaque petite exploration qu’il mène avec d’autres enfants Pandawa du village, il revient blessé à cause de chutes, de course trop rapide, où d’une minuscule créature de la forêt qui l’aurait terrifié. Cela le démoralise, et ces temps-ci, il n’arrête pas de me dire qu’il n’arrivera jamais à être comme son idole, qu’il ferait mieux d’abandonner. Cela n’a beau être qu’un rêve d’enfant, voir mon fils dans cet état m’attriste malgré tout. 
En faisant quelques courses au marché du village l’autre jour, j’ai aperçu une affiche annonçant l’ouverture, au musée de Pandala, d’une exposition sur le légendaire Grain de Riz dont on conte les aventures à tous les enfants d’ici. 
La voilà, ma solution : il faut que mon petit ange voie cette relique. Aussi petite soit-elle, petite comme lui, elle en a vécu, des choses. Et je suis sûre que des conteurs se trouveront parmi les visiteurs en ce jour spécial. C’est certain, tout le monde doit déjà se presser devant la vitrine du Grain de Riz. 
Je monte, enjouée, dans la chambre de Baifan. Il est allongé sur le côté, sa jambe encore emplâtrée, et semble toujours aussi déprimé. Je viens doucement m’asseoir à son chevet, le caressant entre ses deux petites oreilles noires.  

Mon chéri, cela fait déjà une semaine que tu n’as pas mis la truffe dehors… Il y a une exposition spéciale pour aventuriers au musée, aujourd’hui !... 

Je guette sa réaction. Il lève à peine le regard, un regard tristounet. 

C’est pas la peine, maman. Être aventurier, c’est pas du tout pour moi. Je suis trop petit, trop faible. Je vais finir par aller travailler aux rizières d’Akwadala, là où il n’y a pas d’aventures, et où je ne risque pas de me blesser pour rien…

Je lui ôte sa couverture d’un coup, la lançant au bout du lit. 

Hop hop, on ne discute pas ! Je sais que cette exposition va t’intéresser. Et puis, de toute façon, moi, j’ai envie d’y aller. Et il est hors de question que je te laisse seul à la maison. Alors debout, que je t’aide à t’habiller !

Il fait d’abord la moue, puis m’adresse un petit sourire, enfin, pour me remercier de me soucier de lui. Il est adorable. Je l’aide à s’habiller puis lui apporte sa béquille en bois de bambou. Le musée n’est qu’à quelques pas de la maison, et j’essaye de faire sourire mon fils tout le long du chemin.
Les grandes portes du bâtiment sont ouvertes. L’exposition se trouve dans la toute première salle, pour qu’on ne puisse pas la rater ! Une foule de visiteurs se presse effectivement devant une petite vitrine, qui dépasse à peine des têtes de tout le monde. J’essaye de frayer un chemin à Baifan au premier rang ; je m’en sors plutôt bien. Et, en levant les yeux, je le vois enfin. Il est là. Le fameux Grain de Riz dont on m’a conté les histoires toute mon enfance. Une véritable célébrité sur notre île ! Je me souviens qu’étant petite, je collectionnais chaque grain de riz que je trouvais, espérant que ce soit lui. C’était ma motivation pour aller travailler aux rizières, à l’époque !
Baifan  regarde le Grain de Riz, d’un air dubitatif. C’est vrai que je ne lui en ai jamais conté les aventures. Je le sens déçu. Soudain, une personne dans l’assemblée élève sa voix ; c’est l’heure de la première anecdote. Tout le monde se place en cercle autour de ce Lenald, et l’écoute avec attention. Son histoire est captivante, et des réactions ne tardent pas à se faire entendre parmi le public. Le regard de mon petit ange commence enfin à s’illuminer ! Puis, lorsque le Lenald termine son récit sur un grand assassin lié au Grain de Riz, une autre personne prend la parole. Tous finissent pas enchaîner les histoires, racontant ce qu’ils savent sur cette relique, et apportant un peu plus d’étoiles dans les yeux de mon fils au fur et à mesure. Il est passionné. Il entend les (mes)aventures de celle qui se nomme Kurona, d’une Iopette qui lui paraissait immense, ou les rumeurs de la vieille cité disparue d’Astradala. Je finis par être aussi envoûtée que Baifan.

J’aurais aimé pouvoir partager une histoire, moi aussi, pour redonner le sourire à mon fils. Malheureusement, je n’ai pas vécu de choses extraordinaires en lien avec cette relique comme tous ces doués conteurs. Cependant, je pense ce que Grain de Riz fera vivre des aventures à quelqu’un d’autre dans le futur… J’attrape mon fils par les épaules, doucement, puis le regarde avec un sourire bienveillant. Je ne l’ai pas emmené ici pour rien.  

“Alors, qu’est-ce que tu penses que toutes ces histoires ?” 

Il me regarde, des étoiles plein les yeux. Cela faisait des jours que je ne l’avais pas vu si heureux et déterminé. 

C’était… C’était génial ! Génialissime ! Maman, tous ces gens, ils ont vécu des choses si excitantes ! Moi aussi, moi aussi je veux ! Enfin…

Je le coupe dans sa phrase, toujours en souriant.  

Hep là. Pas de “enfin”. C’est ton coeur qui vient de parler ! L’aventure t’appelle, mon chéri. Regarde ce Grain de Riz. Tu me dis souvent que tu es trop frêle et pas assez fort pour devenir aventurier, je sais que ça t’attriste. Cette petite chose, là, dans la vitrine. Tu la trouves musclée et forte ? Non, elle est minuscule. Elle a juste des qualités que d’autres n’ont pas, elle est unique, et elle a trouvé des compagnons d’aventures pour mettre à profit ces qualités et en tirer le meilleur pouvoir. Tu es comme ce Grain de Riz ; une petite chose unique qui n’attend que de trouver les bonnes personnes pour donner le meilleur d’elle-même. 

Je le vois étouffer un petit rire, puis il me prend dans ses bras, avec ses petites pattes.  

Merci maman… Tu trouves toujours un bon moyen de me motiver… Alors dès que ma jambe sera rétablie, je deviendrai moi aussi un Grain de Riz légendaire ! 

Et nous rions tous les deux. Lui de nouveau motivé à atteindre ses rêves, moi, satisfaite de lui avoir rendu sa bonne humeur et son envie de se dépasser. Cela me fendait de le coeur de voir mon enfant si déprimé. 

Et puis, même si tu ne pars pas à l’aventure et que tu vas travailler aux rizières d’Akwadala, qui sait, tu pourrais découvrir un grain de riz aussi spécial que celui-ci ? Tu deviendrais si célèbre ! Ce que je veux te dire, mon chéri, c’est aussi que, peu importe ton choix de vie, que cela soit grand aventurier comme Kérubim Crépin, ou récolteur de riz, il y aura toujours quelqu’un qui sera fier de toi. Moi la première ! 

Nous rentrons donc, tous les deux d’excellente humeur et pleins d’espoir et d’étoiles dans les yeux. J’ai presque envie, moi aussi, de me lancer dans de grandes aventures en quête de reliques aussi légendaire que notre fameux Grain de Riz !


(Limaginaire, de retour avec ses participations le dernier jour à la dernière minute ! Bonne lecture ~♪)
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Telle une statue de Terrdala, le conservateur impassible avait considéré chacun des récits avec le sérieux et la rigueur qu’exigeait son titre. Ce dernier s’évertuait à dénouer le vrai du mythe afin de tracer mentalement une fine ligne du temps sur laquelle aurait glissé le grain de riz avant de parvenir jusqu’à lui. Grognant intérieurement, le vieux Pandawa, dont la toison blanchie par le temps appelait au respect, réalisa avec amertume que le voile d’incertitudes qui enveloppait la relique ne serait jamais totalement dissipé. Depuis des décennies, son amour pour les antiquités n’ayant eu que pour égal sa passion des mystères, il se surprenait lui-même à ressentir cette irritation envers le minuscule grain qui gardait étanchement le moindre de ses secrets.

Alors que la voix de Panda Morreto cessa de résonner dans la pièce, le conservateur attendit quelques secondes, laissant l’opportunité à d’éventuels retardataires de prendre la parole. Faisant rouler lentement sa barbe hirsute entre ses doigts, le vieil homme observa longuement la foule dont la diversité insolite démontrait l’engouement général pour l’exposition, puis il prit la parole d’une voix profonde et légèrement rauque.

- Bonsoir, je vous remercie pour votre présence ainsi que pour ces récits partagés, qui m’ont semblé tous plus intrigants les uns que les autres. Ce sera un méticuleux travail que celui de compiler toutes ces légendes afin démystifier ce grain de riz. Sans votre aide colossale, le musée n’aurait pu faire une si belle avancée au niveau de ses recherches.

Contournant les morceaux de verre qui jonchaient le sol, il fit quelques pas vers le piédestal où brillait la céréale. Le conservateur retourna un léger sourire au petit Baifan dont les yeux brillants avaient croisé les siens depuis le premier rang, avant de reprendre son discours.

- Malgré qu’il ait été mis en terre, avalé, écrabouillé, volé, jeté, qu’il ait macéré des jours durant, voyagé au coeur de Pandala, passant de vendeurs en voleurs, de mains amies en mains ennemies, le riz est resté intact depuis des siècles. Après réflexion, les propos de Lady-Caly m’ont semblé justes alors qu’elle mentionnait qu’en lui-même il n’est pas proprement bon ou mauvais. La théorie selon laquelle le grain se lierait avec son possesseur afin d’exaucer ses plus profonds désirs me semble une juste supposition. Devant tous ces faits mis en lumière, ma volonté à poursuivre mes recherches s’en retrouve décuplée.

Son regard gris clair s’attarda quelques secondes sur le riz exposé à tous les regards,un long frisson parcourant son corps recourbé. Était-il le seul à avoir ressenti la brise froide qui venait de traverser la pièce ?

- N’empêche qu’il m’aura donné bien des nuits blanches, murmura-t-il comme pour lui-même. Oh oui ! Bien des nuits blanches et un nombre incalculable de maux de tête. Je me souviens de cette nuit orageuse, comme si c’était hier. Le musée ayant perdu peu à peu de son éclat, j’ai dû me résoudre à fermer ses portes. Pendant de longues semaines, j’ai pris soin de mettre en lieu sûr chacun des artéfacts qui avaient jadis soulevé la curiosité des visiteurs. Alors que je venais tout juste de terminer l’emballage d’un vieux tonneau encore rempli de Pandarium Tremens, j’ai cru entendre, entre deux coups de tonnerre, un bruissement à l’extérieur du bâtiment. Mettant de côté ma tâche, j’ouvris la porte centrale apercevant une ombre filer entre les bambous. Une minuscule boîte à peine plus grande qu’une granouille, avait été posée sur le paillasson.

- Le grain de riz ! s’exclama une jeune pandawa.

- Oui ! Quelle ne fut pas ma surprise de découvrir à l’intérieur de cette boîte finement sculptée un insignifiant grain de riz. Du moins c’est ce que j’ai cru, avant que le musée ne soit le théâtre d'événements des plus étranges .

La voix du vénérable panda s’assourdit pour ne devenir qu’un murmure feutré, imprégnant la salle d’une atmosphère énigmatique.

- Au commencement ce n’était qu’une impression de malaise, un fourmillement logé à la base de ma nuque ou cette impression d’être constamment observé. À maintes reprises , alors que j’arpentais le musée, j’ai cru entrevoir des ombres qui se dissipaient à mon approche. Lorsque je me suis mis à entendre murmures et bruits de pas, j’ai cru que la folie m’avait envahie. Puis soudainement, certains objets se sont animés. Les sacs de riz se déversaient sans raison sur le sol et certains livres que j’avais soigneusement rangés se retrouvaient chaque matin ouverts sur mon bureau.  Face à ces étranges phénomènes, j’ai consulté le shaman du village qui, après une séance de méditation, semblait convaincu qu’un esprit de la région s'intéressait au grain de riz. Éveillant ma curiosité, ces révélations m’ont entraînées vers une série de recherches qui m’ont fait réaliser que je tenais dans cette boite un véritable trésor. Pris d’une motivation soudaine, j'entrepris de sortir le musée du sommeil dans lequel il était plongé. Je n’avais plus qu’une idée en tête, offrir à cette relique ancestrale la notoriété qui lui était due. Cumulant les rumeurs, j’ai travaillé d’arrache patte afin de recoller les bribes de son histoire. La suite vous la connaissez, comme votre présence en témoigne au travers les récits que vous avez narrés. J’espère sincèrement pouvoir démystifier les zones d’ombres qui l’entourent.
 
Faisant un léger signe de tête au scribe Tensho qui, tout au long de la soirée avait ’’encrées’’ sur papier de riz les différentes légendes, le conservateur se redressa, toisant longuement la foule du regard.

- Bien que tous vos récits ont contribué à l’avancée de mes recherches, il y en a trois qui par leur rigueur m’ont particulièrement interpellé ce soir, me laissant sans voix.

Le directeur du musée prit un parchemin que le scribe lui tendit, le déroula lentement puis se racla la gorge dans un bruit sourd avant de reprendre son énoncé.
 
- Pour le dynamisme et la créativité qu’il a su faire preuve lors de sa narration, le musée offre le troisième lot à Fantomine. Le rythme endiablé de votre histoire a su nous captiver. Vous avez certainement la fibre d’une bonne conteuse et votre récit sera compilé dans le livre dédié au grain de riz.

- Ayant fait preuve de rigueur au niveau des détails et d’une précision surprenante, nous offrons le deuxième lot à monsieur Tashigo. Votre récit, quoique surprenant, nous a démontré que le grain de riz peut passer au travers diverses étapes de macération tout en gardant sa forme initiale. De plus la morale qui en découle porte à la réflexion. Votre histoire aura également sa place dans les mémoires officielles de notre bien aimée céréale.

- Finalement...

Le vieux Pandawa parcouru la foule du regard à la recherche de la sacrieur dont le prénom lui avait échappé  (Pollux shooter) mais qui avait sut l’émouvoir.

- Mademoiselle, vos talents de conteuse sont à mes yeux indéniables. Non seulement vous nous avez partagé des faits qui mythologiquement sont pertinents, mais vous avez également soulevé de nouveaux éléments qui peaufineront mes recherches. Votre texte sera retranscrit dans le recueil qui formera les mémoires du grain de riz. Vous vous méritez donc le premier lot, gracieuseté du musée.

Roulant soigneusement son parchemin, après avoir félicité les participants, le conservateur, les traits visiblement tirés par la fatigue, remercia la foule une dernière fois.

- Encore aujourd’hui j’ai la certitude que le grain de riz possède une volonté propre et que ce dernier m’a insufflé la motivation qui m’a mené à la réouverture du musée. Je ne vous remercierai…

Un employé s’approcha du piédestal aussi discrètement que sa large stature le lui permettait, chuchotant quelques mots à l’oreille du directeur. Alors qu’ils discutaient brièvement, ce dernier sembla soudainement confus, bredouillant quelques excuses à la foule qui commençait lentement à se dissiper.

- Hum...hum. Mes chers visiteurs, il semblerait qu’une erreur ait été commise lors de la mise en place de l’exposition.  Un de nos employés aurait malencontreusement interverti LE grain de riz avec un vulgaire grain provenant de la première récolte de la saison 650. Nous vous présentons nos plus sincères excuses. Cependant, soyez rassurez notre relique est en sécurité. Je vous remercie pour vos nombreuses participations, le musée fermera ses portes dans quelques instants.

Hochant légèrement la tête en guise de salutation, le conservateur s’éclipsa, prenant congé de la foule.
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Score : 160
En ce jour dédié aux éloges et à la gloire de la mythique céréale , une foule aussi nombreuse que cosmopolite semblait s'être assemblée pour chanter les louanges de l'ancêtre de tout les grains de riz...
Et chantés, ils le furent assurément, tout autant que déclamés au son grave des tambours, ou de la voix haut perché des petits pandawa, iopette ou des nombreux autres admirateurs venus en ces lieux de savoirs pour ajouter leurs grains de sel à la légende DU grain de riz ! Le seul, l'unique, le précieux ! Ce sublime grain qui a traversé les âges, causé aussi bien des cataclysmes, que des petits drames solitaires ou des bonheurs sans pareils et qui aujourd'hui, se trouve à portée d'oeil et presque à portée de bouche de cette drôle d'assemblée .
Pandawa, iop, Lenald ou Sacrieur, jeune âme ou plus âgée, une par une, elles s'étaient succédées et avaient apporté leur propre pierre à l'édifice de sa légende. Aussi, après la prestation remarquable de la célèbre Sramette Fantomine, connue et reconnue pour ses histoires captivantes et ses apparitions remarquées dans les plus grandes réunions de baladins et de conteurs du Monde des Douze,( dont les très fameux Récits d'Inventions, organisés par le terrible et mystérieux Conseil des Sadeurs) un nouvel orateur, que personne n'avait paru remarquer jusque là, vint prendre place à côté de la vitrine.
Son kimono de soie écarlate était d'une facture exquise, mais les traits de son visage disparaissaient dans les ombres du large couvre-chef conique, si répandu sur l'île. Les mains fourrées dans ses manches et les bras croisés sur l'estomac, il réussit pourtant à dénicher on ne sais où un coussin sur lequel il s'assit aussitôt en tailleur.
D'une voix teintée d'un fort accent insulaire, il entreprit de débuter son récit:
_Bien, voyons en ce temps là... Quand étais-ce exactement  ? -420 ou -421 ?
Visiblement gêné par le brouhaha incessant de son auditoire, il marqua une pause outragée. Son visage toujours invisible, le frémissement de ses longues et interminables moustaches à la mandarin était, pour ainsi dire, le indice visible de son courroux. Un instant, il sembla même sur le point de se lever et de partir sans autres formes de procès. Mais la soif de partager son histoire l'emporta  sur son orgueil et dans un soupir, il reprit son histoire. Après tout il aurait dû y être habitué maintenant ! Rares étaient les personnes à lui accorder l'attention qu'il méritait.
_Je disais donc, que cette histoire prend place en l'an 420 avant notre ère. Ici, sur notre terre ancestrale de Pandala. A l'époque, nulle division en "provinces"(et il cracha presque le mot) indépendantes ! Pas d'Akwadala, Terrdala et autres ... Il n'y avait que l'Empire Qin, le seul et l'unique! Il s'étendait des bambouseraies de l'Ouest aux rizières de l'Est. Les cités Etats et les petits royaumes du Continent nous craignaient et nous respectaient et les marchands venaient des 4 coins du Monde des Douze pour acheter notre soie et notre lait de Bambou.
L'Empire était naturellement dirigé par le puissant, le sage et vénérable Empereur Sé Tit Kuye  depuis son palais de la cité Céleste. Guidant son peuple avec fermeté et sagacité, l'Empereur malgré les milles concubines et geishas de son harem n'avait toujours pas trouvé l'amour et donc par conséquent, n'avait encore aucun héritier. Cependant grand artiste dans l'âme et mécène accompli, il se consolait en donnant des fêtes et des représentations grandioses à longueur d'années !
Son autre grand plaisir était la nourriture. L'Empereur était un aficionados de toutes les formes de riz et de ses préparations ! Nature, cuit à l'eau ou en sauce, moulu en farine et transformé en beignet ou en galette, ou même macéré, il en raffolait tout simplement.
Et justement ,lors d'une des fêtes continuelles données en son honneur en cette année 420 d'avant notre ère, lui fut servi un bol de riz particulier ! Particulier, car il contenait en son sein le fameux Grain mythique, l'Unique comme il est parfois appelé. Peut-être Sé Tit Kuye en aurait-il été flatté s'il avait été au courant ? Mais tel n'était pas le cas !
Comment ce grain de riz extraordinaire était-il arrivé précisément dans le bol destiné à l'Empereur?
Assassin, hasard pernicieux ou simplement un de ses loyaux sujets, écrasés d'impôts et de lois injustes édictées uniquement dans le but de satisfaire ses nombreux appétits démesurés, l'avait-il mis là ? Nous ne le saurons sans doute jamais, mais toujours est-il, que fidèle à sa sinistre réputation, sitôt le Grain avalé, l'Empereur s'étouffait et ne tardait pas à trépasser !
Sans descendance ni héritier désigné, l'Empire Qin s'éteignit avec lui ...

Marquant une pause solennelle, le mystérieux orateur parcourut du regard son auditoire turbulent:

_Et c'est ainsi que le Grain de Riz gagna un nouveau Titre : "Destructeur d'Empire" !

Très fier de son petit effet sa déception fut d'autant plus grande que personne dans l'assemblée ne semblait avoir écouté un traitre mot de sa conclusion. Tout les regards et l'attention était à nouveau, entièrement tournés vers le grain de riz ... 
Ses épaules s'affaissèrent complétement et il poussa un soupir de déception déchirant :
_Satané Grain de Riz ! Tu as encore une fois tout gâché !

Le dos vouté, Sé Tit Kuye, dernier Empereur de Pandala, invisible aux yeux des simples mortels, traina sa silhouette ectoplasmique vers la sortie, dans l'indifférence générale.
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